Comme en 2004 et 2005, sept films entrent dans le top600 () des meilleurs films de tous les temps. Avec dix-neuf (), ce sont ainsi vingt-six films qui en 2006 contribuent à façonner l'histoire du cinéma.
Après une année 2005 explorant les virtualités mentales, expressionniste et extrêmement novatrice, 2006 marque probablement le retour au lyrisme à la capacité à générer des grands mouvements de caméra qui sont comme autant de grands mouvements d'exploration de la mémoire individuelle ou collective.
Un couple parfait, meilleur film de l'année, est pourtant un objet fragile, un cristal qui reflète sans le décalquer l'un des chefs-d'uvre du cinéma : Voyage en Italie. Un couple parfait est aussi une scène de ménage frontale sur deux heures. Le film est tendu vers les conséquences possibles d'une phrase lâchée un peu vite, un peu superficiellement dans un état de fatigue. S'enclenche alors la machine du doute et du naufrage possible. Suwa convoque les regrets liés à l'art et à l'enfance, comme un idéal d'un début toujours recommencé, d'un surgissement de l'émotion toujours possible. C'est cette quête qui hante les personnages pris en gros plan ou noyés dans l'ombre. L'art de Suwa consiste à condenser les regrets du temps et de l'espace extérieur dans une chambre ou sur un visage en utilisant les mouvements de caméra avec autant de parcimonie qu'un poète pour composer un vers. La chambre d'hôtel devient sculpture auquel on peut appliquer les mots de Rilke "Ici était la vie, mille fois contenue dans chaque minute, dans le désir et la peine, dans la folie et l'angoisse". Utilisés avec parcimonie, tous les objets concourent en effet à la tension permanente : les portes qui séparent, les table qui empêchent un rapprochement, les lampes ou les lits. La poésie, l'intensité de l'émotion s'accommode mal du bruit et du mouvement. Pour que le miracle ait lieu comme en son temps celui de Rossellini, il faudra les éléments inverse : ni foule, ni bruit : sur le quai d'une gare il faudra rester sur place, laisser partir le train, rapprocher deux têtes.
Rien de fragile dans les cinq films suivants qui portent hauts les couleurs de metteurs en scènes confirmés qui travaillent pour deux d'entre-deux l'exploration de nappes de passé à partir de pointes de présent faisant la part belle aux flash-back (Mémoires de nos pères, Volver). Les trois autres films explorent aussi l'espace mentale à partir soit d'un espace réel conçu comme médiatisé par le cerveau (Curs et Takeshi's) ou en crise par rapport à l'action (Le dahlia noir).
Avec Flandres, Bruno Dumont signe son film le plus abouti mettant en scène la matière humaine la plus brute pour que son spectateur-lecteur y trouve une spiritualité. Eloignée de toute forme de psychologie, la mise en scène travaille à la fois l'informe et le signe, juxtapose les deux parcours de Demester et de Barbe, l'un filmé comme passif devant ses pulsions, enfermé en lui-même et l'autre comme promis à l'extra-lucidité au travers de la folie. La morale de tout cela n'a rien d'évident et l'interprétation demeure l'apanage de chaque spectateur.
Top 30
1 : Un couple parfait,
Nobuhiro Suwa
2 : Mémoires
de nos pères, Clint Eastwood
3 : Le dahlia noir, Brian
de Palma
4 : Volver, Pedro Almodovar
5 : Coeurs, Alain Resnais
6 : Takeshi's, Takeshi Kitano
7 : Flandres, Bruno Dumont
8 : Munich, Steven Spielberg
9 : L'ivresse du pouvoir,
Claude Chabrol
10: Les anges exterminateurs,
Jean-Claude Brisseau
11 : Les infiltrés,
Martin Scorsese
12 : Le caïman, Nanni Moretti
13 : V pour Vendetta,
James McTeigue
14 : Lord of war, Andrew Niccol
15 : Bamako, Adberrahmane Sissako
16 : Le soleil, Alexandre Sokourov
17 : Klimt, Raoul Ruiz
18 : L'intouchable, Benoît
Jacquot
19 : Je pense à vous,
Pascal Bonitzer
20 : Dans Paris, Christophe
Honoré
21 : Bled number one,
R. Ameur-Zaïmeche
22 : Marie Antoinette,
Sofia Coppola
23 : The host, Bong Joon-ho
24 : Le nouveau monde, Terrence
Malick
25 : Fragments sur la
grâce, Vincent Dieutre
26 : Little miss Sunshine,
J. Dayton et V. Farris
Autres films vus (
):
La terre abandonnée,
Vimukthi Jayasundara
Changement d'adresse,
Emmannuel Mouret
Lady Chatterley, Pascale
Ferran
Borat, Larry Charles
Le vent se lève, Ken
Loach
Reinas, Manuel Gomez Pereira
Miami vice, deux flics à
Miami
Paul dans sa vie, Remi
Mauger
Shanghai dreams,
Wang Xiaoshuai
Scoop, Woody Allen
Ca brule, Claire Simon
Le secret de Brokeback
montain, Ang Lee
Le labyrinthe de Pan,
Guillermo del Toro
Paprika, Satoshi Kon
Truman Capote, Bennett
Miller
Twelve and holding,
Michael Cuesta
Pirates des caraibes 2, Gore Verbinsky
Hors concours :
Mala Noche, Gus van Sant
Nausicaa de la
vallée du vent, Hayao Miyazaki
The oh in Ohio (Deauville)
Little children (Deauville)
Half Nelson (Deauville)
Sherrybaby (Deauville)
A guide to recognizing your saints (Deauville)
Forgiven (Deauville)
Stephanie Daley (Deauville)
Pas aimés :
Shortbus , John Cameron Mitchell
Inside man, Spike Lee
La raison du plus faible, Lucas Belvaux
Mission impossible 3, J.J. Abrams
Syriana
Thank you for smoking
L'iceberg
L'illusionnsite (Deauville)
Hard candy (Deauville)
Pas vus (par ordre de regret !)
Ces rencontres avec eux (Straub-Huillet... pas encore programmé à
Caen), La trahison (Pierre Faucon), Azur et Asmar (M. Ocelot), Jardins en
automne (O. Iosseliani), Hors Jeu (J. Panahi), C'est pas tout à fait la vie
dont j'avais rêvé (M. Piccoli), L'Imposteur (C. Hochhäusler), OSS 117 ( M.
Hazanavicius), Les Berkman se séparent (N. Baumbach), Voiture de luxe
(W. Chao), Good Night, And Good Luck (G. Clooney), A Scanner Darkly (R. Linklater),
La fille de l'eau (M. Night Shyamalan), Quand J'étais Chanteur (X.
Giannoli), Crazy, El Aura, Indigènes...
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