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Histoire de l'art
Voir : Peintres américains

Les styles successifs de la peinture américaine : néoclassique, romantique et réaliste sont contemporains des mêmes mouvements qui éclosent alors en Europe.

1-La peinture néo-classique du XVIIIe

Le début du XVIIIe siècle fut marqué par l'arrivée d'artistes européens professionnels dans les colonies anglaises. Ils produisaient pour une clientèle qui vivait dans le luxe. En Nouvelle-Angleterre, les tableaux reflètaient la prospérité des marchands de Boston. Les planteurs des colonies du Sud faisaient appel à des artistes britanniques. La famille était l'un des thèmes majeurs des peintures coloniales.

Dans la première moitié du XVIIIe siècle, des peintres venus de différents pays d'Europe s'installèrent dans les Treize colonies. Jeremiah Theüs (1716 - 1774) est né en Suisse et travailla dans la région de Charleston, en Caroline du Sud. John Smibert (1688–1751), peintre d'origine écossaise, émigra à Boston où il peignit des portraits de l'élite citadine sans originalité. L'une de ses principales œuvres, L'entourage de Berkeley, appelé aussi Groupe des Bermudes (Yale University Art Gallery), adopte une composition baroque. Gustavus Hesselius (1682-1755) quitta la Suède en 1711 et vécut à Philadelphie et dans le Maryland. Il fut le premier à répondre à des commandes publiques dans les colonies américaines : il réalisa des tableaux religieux (Le dernier repas pour l'église Saint-Barnabé du comté de Prince George) ainsi que de nombreux portraits, notamment le premier portrait d'un Amérindien. Le Britannique John Wollaston importa en Amérique le style rococo géorgien caractérisé par la grâce et la légèreté. Joseph Blackburn fut le professeur de John Singleton Copley et se spécialisa dans les portraits de femmes assises. William Willams (1721-1791) produisit quelque 200 œuvres. Son Portrait de Deborah Hall (1766) reprend le système symbolique en usage dans la vieille Europe.

Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle s'affirme une génération de peintres nés en Amérique. Joseph Badger (vers 1708-1765) et Robert Feke réalisent de nombreux portraits des grandes familles de Boston.

La génération de la Révolution américaine oriente la peinture américaine vers la peinture d'histoire et affirme le premier style américain : le néoclacissisme, contemporain de celui qui prévaut en Europe et pour cause : John Singleton Copley (1738-1815), Benjamin West (1738-1820), John Trumbull (1746-1843), Ralph Earl (1751-1801), Gilbert Stuart (1755-1828), Charles Willson Peale, John Trumbull s'installent en Angleterre pour y faire carrière.


Benjamin West (1738-1820) fut le premier artiste américain à se rendre à Rome à l'âge de 22 ans où il fit la connaissance de Johann Joachim Winckelmann et se familiarisa avec le style néoclassique. Contrairement à ses confrères, il ne se limita pas à l'histoire ancienne. En 1770, il peint La Mort du général Wolfe qui montre les derniers instants du général britannique James Wolfe pendant la Guerre de Sept Ans. En 1771, il mit en scène la rencontre entre William Penn et les Amérindiens dans sa Pennsylvanie natale, commémorant ainsi le traité signé par Penn avec les Amérindiens un siècle plus tôt.

John Singleton Copley (1738-1815) fit de nombreux portraits des héros de la Révolution américaine comme James Warren (1763), John Hancock (1765), Samuel Adams (1770-72) ou Paul Revere (1772). En 1774, il entreprend un Grand Tour européen et décide de se fixer à Londres après le déclenchement de la guerre d'Indépendance aux États-Unis. Le roi George III le fait membre de la Royal Academy. Son œuvre s'oriente alors vers la peinture de genre et la représentation de scènes de l'actualité.

La Mort du général Wolfe
Benjamin West (1770)
Samuel Adams
John S. Copley(1772)

John Trumbull (1746-1843) fut un autre grand peintre américain néoclassique : il servit dans l'Armée continentale sous les ordres de George Washington avant de s'installer à Londres en 1784 pour devenir président de la Royal Academy of Arts et peintre officiel de George III.

Charles Willson Peale (1741-1827) arriva à Londres en 1767 mais revint en Amérique quelque temps plus tard. Il figura des portraits des Pères fondateurs des États-Unis. Il reçut des commandes du Congrès continental pour produire le premier portrait monumental de George Washington (232,7 cm sur 148,3 cm, 1779). Il est souvent considéré comme le fondateur du premier grand musée des États-Unis. On lui doit en effet la création du Peale Museum à Philadelphie.

Ralph Earl (1751-1801) signa un portrait de Roger Sherman auquel il donna l'impression de solennité et d'intégrité républicaine grâce à une grande maîtrise de l'espace.

Gilbert Stuart (1755-1828) peignit les plus célèbres portraits de George Washington. Il en exécuta une centaine durant sa carrière. Toutes ces copies sont issues de trois portraits effectués du vivant de George Washington : celui de 1795 (type Vaughan, exposé au Metropolitan Museum of Art) ; le portrait dit « de l'Athenaeum » (1796) ; enfin le portrait dit "de Lansdowne" (1796), conservé à la National Portrait Gallery à Washington. Le second portrait (Athenaeum Portrait) a été réalisé à Philadelphie et resta inachevé : il inspira la figure du billet d'un dollar. La simplicité du décor inscrit ces portraits dans la tradition égalitariste de la peinture américaine.

John Vanderlyn
(1776-1852) est le premier peintre américain à préférer Paris à Londres. Il fréquenta l'école des beaux-arts de Paris et fut l'élève de Jacques-Louis David qui lui enseigna le style néoclassique. Il réalisa des portraits, des tableaux d'histoire romaine et de mythologie dont une Ariane nue (1812, Pennsylvania Academy) qui le fit connaître en provoquant le scandale.

Samuel Morse (1791-1872), le développeur d'un télégraphe électrique et de l'alphabet, fut aussi un peintre néoclassique. Il suivit des études artistiques auprès de Benjamin West à Londres et peignit des tableaux historiques édifiants. En 1825, il fonda à New York la société des Beaux-Arts (National Academy of Design) et devient son premier président. La municipalité lui commanda la même année un portrait de Lafayette.

De nombreux Américains continuèrent à se former en Europe ; l'école de Düsseldorf en Allemagne fut fréquentée des peintres comme Emanuel Leutze, Richard Caton Woodville ou Alfred Jacob Miller. Leur style se caractérise par une composition géométrique stricte, la présence de nombreux objets et des couleurs relativement ternes. Emanuel Leutze (1816-1868) se spécialisa dans la peinture d'histoire : son tableau le plus connu est Washington traversant la Delaware, réalisée en 1849. Bien qu'elle exalte le patriotisme américain dans la guerre d'indépendance, cette œuvre peinte en Allemagne était en réalité destinée au public germanique, après l'échec des révolutions de 1848.


2- Le romantisme américain : l'ecole de l'Hudson, le luminisme et les peintres des Rocheuses.

Le mouvement dit L'Hudson River School regroupe plusieurs peintres américains qui travaillèrent des années 1820 aux années 1870. L'expression n'a toutefois été forgée qu'en 1879 et tente de s'imposer comme le premier mouvement pictural né aux États-Unis alors qu'il est l'incarnation d'un sentiment romantique ressenti egalement en Europe. La spécificité du mouvement américain, et notamment l'importance accordé au paysage, est néanmoins certaine.

L'entaille de Crawford
Thomas Cole ,1839
Les âmes soeurs
Asher Brown Durand, 1849
La piste de l'Oregon
Albert Bierstadt, 1869

Thomas Cole (1801-1848) s'installe à Catskill (état de New York) en 1836, bientôt imité par d'autres peintres et est considéré comme le fondateur de l'école de l'Hudson.

Les peintres de la première génération s'attachent à représenter la vallée de l'Hudson River et ses alentours, mais aussi les Catskill Mountains, les Adirondacks et les montagnes Blanches, dans le Nord-Est des États-Unis. Ils figurent essentiellement des paysages sur de grands formats. Ils appliquent la philosophie du Sublime. Ils pensent que la Nature est la manifestation de la puissance et de la bonté divine. Les paysages préservés des États-Unis sont comparés au Paradis originel.

Après la mort de Thomas Cole en 1848, Asher Brown Durand (1796–1886) prend la tête du mouvement. Il devient président de la National Academy of Design et codifie les règles de la peinture du paysage.

Pourtant, les peintres de l'Hudson River School ne sont pas issus des mêmes milieux sociaux et n'ont pas exactement le même style. Beaucoup d'entre eux travaillent dans le Studio Building sur West Tenth Street à New York. La seconde génération de l'Hudson River School utilisa les effets de lumière et d’atmosphère.

Frederic Edwin Church (1826–1900) peint les Chutes du Niagara (1857, Corcoran Gallery, Washington DC), mais aussi des paysages en dehors des États-Unis (Andes, Proche-Orient, régions polaires).

Peintres des Rocheuses

Peintre d'origine allemande, Albert Bierstadt (1830-1902) est le dernier représentant de l'Hudson River School. En 1858, il participa à l'expédition du colonel Frederick W. Lander dans les Montagnes Rocheuses. Il retourna dans cette région en 1863 et en 1871-1873. Ses paysages de l'Ouest américain sont détaillés, grandioses parfois écrasants. Certains le classent dans le courant du luminisme. Ses nombreuses représentations de la Vallée du Yosemite montrent une nature généreuse. Son tableau Montagnes Rocheuses (Landers Peak, 1863) fut acheté par le magnat des chemins de fer James McHenry pour 25 000 dollars ; il révèle de nombreux détails ethnologiques et propose un paysage équilibré.

Thomas Moran (1837-1926) a souvent peint les Montagnes rocheuses. La vision de Thomas Moran des paysages de l'Ouest américain fut déterminante pour la création du parc national de Yellowstone. Ses peintures qui avaient saisi la grandeur et la diversité des paysages de Yellowstone furent présentées au Congrès américain par les initiateurs du projet du parc. On fait quelquefois référence à Thomas Moran avec Albert Bierstadt, Thomas Hill et William Keith comme l'école des Montagnes rocheuses à cause des nombreux paysages de l'ouest peints par ce groupe.

Luminisme

John Frederick Kensett, Martin Johnson Heade et Fitz Henry se détachent de l'Hudson River School par leurs petites peintures contemplatives. Ils représentent des paysages ouverts (mer, lacs, marais salants) mis en valeur par les effets d'atmosphère. Ils forment le courant du luminisme qui considère que la lumière du Nouveau Monde est particulière et qu'elle incarne la manifestation de Dieu dans les paysages.

Amérindiens, scènes de genre et tonalisme

Avec la conquête de l'Ouest, les Américains furent confrontés aux Amérindiens qui devinrent un des thèmes de la peinture américaine du XIXe siècle. George Catlin (1796–1872) fut l'un des premiers à s'intéresser aux sociétés amérindiennes et à l’exploration du Mississippi. L'artiste peignit plusieurs portraits d'Amérindiens en costume traditionnel sur commande de Louis-Philippe Ier en 1845. Catlin est l'un des représentants de la peinture « scientifique » précieuse pour son intérêt ethnologique. La toile de John Wesley Jarvis, Black Hawk and his Son Whirling Thunder (1833) montre l'acculturation des Amérindiens : le père porte le costume occidental. Jarvis représenta les deux personnages comme il aurait peint des notables blancs. Les Amérindiens furent souvent présentés comme une menace, une entrave à la conquête de l'Ouest : George Caleb Bingham mit en valeur les jeux de lumière de Captured by Indians et Belated Wayfarers (1856). Alfred Jacob Miller qui voyagea dans l'ouest et produisit des aquarelles nerveuses sur les Amérindiens.

Albert Bierstadt s'intéressa aussi aux Amérindiens (View of Chimney Rock, Ogalillalh Sioux Village in Foreground, 1860 ; Indian Camp, 1858-1859). Frederick Remington prolongea le thème des Amérindiens dans la première moitié du XXe siècle. Le quotidien des cow-boys et des pionniers sur la Frontière se retrouve dans ses toiles. D'autres peintres mirent en valeur les héros de l'ouest tels que Buffalo Bill.

George Caleb Bingham (1811-1879) s'intéressa aux activités des trappeurs et des bateliers du Mississippi qui incarnaient les valeurs de l'Ouest, telles que l'indépendance, la solidarité et la liberté.

Chasseurs de fourrures
George Caleb Bingham, 1845
Les signaux de fumée
Frederic Remington, 1908


3- Le réalisme américaine

Après 1850, la conquête de l'Ouest, la Guerre de Sécession, l'urbanisation, l'industrialisation transformèrent les États-Unis qui accédèrent au rang de puissance mondiale. Ces mutations affectent la peinture de la deuxième moitié du XIXe siècle. Les artistes américains s'adaptent à l'ouverture internationale : ils sont les plus nombreux au salon annuel de Paris

Winslow Homer (1836-1910) fait partie des artistes américains de cette époque qui ne se sont pas formés à l'étranger. Homer est le principal représentant du réalisme américain et a privilégié les thèmes ruraux, sans négliger le monde des enfants. Installé dans le Maine à la fin de sa vie, il peint avec lyrisme des marines et des paysages, traduisant les forces spirituelles de la nature. Homer a su se distinguer par son sens très personnel de la couleur.

Thomas Eakins (1844-1916) fit des études de médecine aux États-Unis, fréquenta l'atelier du peintre Gérôme à Paris, avant de s'installer définitivement à Philadelphie. Eakins est le peintre des classes moyennes américaines et se rattache aux réalistes français. Il figura des baigneurs et des athlètes avec précision.

John Singer Sargent (1856-1925) a beaucoup voyagé, mais il finit son existence en Amérique. Ses portraits utilisent une palette sobre comparable à celle de Velasquez.


4- L'impressionnisme

L'impressionnisme apparu en France dans les années 1860 est mis à l'honneur aux États-Unis grâce à de grandes expositions à Boston et à New York dès les années 1880. Les premiers peintres américains impressionnistes tels que Theodore Robinson visitèrent la France et se lièrent d'amitié avec des artistes comme Claude Monet.

Des années 1890 aux années 1910, l'impressionnisme américain se développa dans les "colonies d'artistes", c'est-à-dire dans des groupes de peintres vivant ensemble et partageant un même style. Elles se formaient dans de petites villes où le coût de la vie était raisonnable, où les paysages offraient des thèmes pour les tableaux et où les peintres pouvaient trouver une clientèle pour les acheter. Certaines de ces colonies continuèrent d'être actives dans les années 1920. L'impressionnisme américain se subdivisa en écoles régionales : Edmund Tarbell et Frank Benson participent à la Boston School spécialisée dans la peinture des femmes élégantes en intérieur avec des références à Vermeer. Les autres écoles régionales correspondent aux colonies d'artistes dispersées dans le pays : Hoosier School (Indiana), School of Old Lyme (Connecticut), écoles de Pennsylvanie et de Californie.

Parmi les impressionnistes américains, le groupe des dix exerce à New York et adopte des positions esthétiques radicales. Il fut formé par Thomas W. Dewing et Frank Benson en se séparant de la Society of American Artists. Weir introduit des ponts modernes, des éléments mécaniques dans ses toiles. Dewing se spécialise dans les scènes d'intérieur qui transpire la solitude ou la mélancolie. Robert Reid ne peint presque que des jeunes femmes dans un beau décor de plantes et de fleurs.
La peinture impressionniste tomba en désuétude après l'exposition internationale d'art moderne de l'Armory Show, qui s'est tenue à New York en 1913.

Parmi les peintres impressionnistes américains, Mary Cassatt (1844-1926) tient une place particulière : installée en France, elle côtoya les impressionnistes français (Edgar Degas et Claude Monet). Elle est considérée comme la première femme peintre américaine. Le thème de la mère et de l'enfant représente un tiers de sa production, alors qu'elle n'enfanta jamais. Mary Cassatt eut un rôle important dans la diffusion de l'impressionnisme auprès de ses compatriotes.

James Whistler (1834-1903) partagea le sort des impressionnistes refusés au Salon officiel de Paris. Ses peintures traduisent souvent ses sentiments intimes, comme la solitude. Il peignit des portraits élégants en utilisant des couleurs subtiles et des formes harmonieuses.


5- Le réalisme moderne américain

Le réalisme est une idée nouvelle dans l'art américain du début du 20e siècle. La littérature, la musique et la peinture donnent alors une vision contemporaine des mutations à l'œuvre, des œuvres nouvelles, plus urbaine qui reflètent la vie en ville pour une population qui, en entrant dans le nouveau siècle, devient de moins en moins rurale.

L'Ashcan school (L'école des poubelles) est le mouvement réaliste le plus connu aux États-Unis au début du XXe siècle, surtout connu pour des œuvres représentant des scènes de la vie quotidienne dans les quartiers pauvres de New York. Le mouvement est né d'un groupe appelé The Eight, dont une unique exposition d'ensemble à la galerie Macbeth de New York en 1908 avait fait sensation. Parmi ses membres, cinq peintres seront rattachés à l'École Ashcan: William Glackens (1870-1938), Robert Henri (1865-1929), George Luks (1867-1933), Everett Shinn (1876-1953) et John French Sloan (1871 - 1951). Ils avaient étudiés ensemble sous la direction de Thomas Pollock Anshutz à la Pennsylvania Academy of Fine Arts. Les trois autres membres de The Eight qui divergèrent par leur style de L'Ashcan school, étaient Arthur B. Davies (1862-1928), Ernest Lawson (1873-1939) et Maurice Prendergast (1859-1924).

L'Ashcan school, n'était pas un groupe organisé. Leur unité se composait d'un désir de vérité sur la représentation de la ville. Robert Henri "voulait que l'art s'apparente au journalisme. Il voulait une peinture aussi réelle que la boue en automne, ou, en hiver les mottes de merde de cheval prises dans la neige de Broadway. C'est Art Young qui utilise le premier le terme Ashcan school en 1916. Le terme est ensuite appliqué à un groupe d'artistes qui dépeint la ville principalement New York et principalement les quartiers ouvriers. Il s'agit notamment, outre les cinq du groupe des huit de George Bellows, Arnold Franz Brasz, Mabel Dwight, et du photographe Jacob Riis. Edward Hopper (1882-1967) comme George Bellows et Brasz était étudiant de Henri mais il refusa toujours son inclusion dans le groupe : ses représentations de rues de la ville étaient toujours exempts des détails habituels chers à l'école et jamais une seule poubelle n'y figura.

Les artistes de l'École Ashcan se rebellaient contre l'impressionnisme américain, qui représentait alors l'avant-garde de l'art américain. Contrairement aux lumières chatoyantes de l'impressionnisme, leurs œuvres étaient généralement sombres et représentaient des instants de vie plus sévères avec des prostituées, des ivrognes, des porcs à l'étale des bouchers, des immeubles avec du linge accroché sur des fils, des matchs de boxe et de lutteurs. C'était leur habitude fréquente, bien que non exclusive à mettre l'accent sur la pauvreté et les réalités quotidiennes de la vie urbaine qui ont incité les critiques américains à les considérer en marge de l'art moderne.


6- L'avant-garde américaine

C'est l'Armory Show de 1913, exposition d’art moderne à New York qui fit connaître l'avant-garde européenne sur côte orientale. Elle réunit 25 artistes américains, dont le but était de traduire l'art européen en langage américain. Les 1600 œuvres de l'Armory Show furent ensuite transportées à Boston et Chicago. À la suite de cette exposition qui provoqua le scandale, se constituèrent les premières collections d'art moderne, par exemple par le docteur Barnes.. . L'influence de Marcel Duchamp fut essentielle dans l'évolution de la peinture américaine. Il fit connaître le dadaïsme dès 1915 à New York. En 1913, son Nu descendant un escalier provoqua le scandale. À New York, il entretint des liens avec Man Ray, Alfred Stieglitz et Francis Picabia avec qui il fonda la revue 291. Il fut naturalisé américain en 1955. L'art abstrait progresse avec l'inauguration du MoMa en 1929 et la fondation de l'Association des Artistes Abstraits Américains en 1936.

 


7 - L'Abstraction lyrique

À partir de 1933, les États-Unis accueillent des artistes ayant fui l'Allemagne nazie : Hans Hofmann (1880-1966) est à l'origine de la technique du Push and Pull (tiraillement). Josef Albers (1888-1976) enseigna au Bauhaus de 1923 à 1933 avant de migrer aux États-Unis. Il est considéré comme un des initiateurs de l'art optique ou « Op art » et reprit les recherches de Paul Cézanne sur l'abstraction.

Entre 1939 et 1942, Marc Chagall, Max Ernst, Fernand Léger, Piet Mondrian, Yves Tanguy, Roberto Matta, André Masson et André Breton émigrent à leur tour. Entre 1940 et 1948, Salvador Dalí réside aux États-Unis où il connaît un grand succès commercial. En réalité, si l'on met de côté Matta, les artistes européens eurent peu de contact avec leurs homologues américains. Dès 1948, ces derniers avaient fondé leur voie propre. Après la guerre, New York devient le centre majeur de l'avant-garde. Les expressionnistes abstraits puisent leur inspiration et leur technique dans plusieurs sources. Ils sont marqués par les influences surréalistes : subconscient, écriture automatique, dripping. Ils furent aussi marqués par l’abstraction de Wassily Kandinsky et d'Arshile Gorky.

Après la Seconde Guerre mondiale, les conditions économiques, politiques et artistiques suscitent une nouvelle manière de peindre, de voir et de donner à voir aux États-Unis. Après des années de crise, l'économie américaine repart. Avec le début de la guerre froide, la peinture américaine représente pour le gouvernement une arme culturelle exportable.

L'expressionnisme abstrait apparaît en 1948, au cours d'une exposition à New York, financée par des fonds publics. Cet art qui se voulait avant-gardiste, cosmopolite et apolitique fait se déplacer le cœur de l'art moderne de Paris à New York. Cependant, l'expressionnisme abstrait suscite des débats au sein de la classe politique américaine. Les Républicains attaquent violemment ce courant et l'accusent d'être communiste. Au Congrès, ils dénoncent en outre les financements fédéraux qui sont attribués aux peintres expressionnistes. Le début des années 1950 voit le renforcement de cette opposition à cause du maccarthisme, les artistes soupçonnés de sympathies communistes deviennent l'objet d'enquêtes . Pourtant, la période est aussi marquée par le soutien du MoMA de New York, lui-même financé par la fondation Rockefeller. En 1952, le musée organise même un programme international de diffusion mondiale de l'expressionnisme abstrait, The New American Painting.

L'expressionnisme abstrait s’impose avec une nouvelle génération d’artistes vivant à New York d'où le nom d'école de New York. Il se caractérise par des toiles immenses, souvent entièrement peintes (all-over) : la surface du tableau semble se prolonger au dela des bords, éliminant ainsi le problème du champ. Il met en valeur la matière et la couleur utilisée comme matière. Il se divise en deux courants principaux : l'action painting et le Colorfield Painting.

Les peintres de l'action painting produisent de façon violente, avec des gestes rapides voire spontanés. Il est principalement incarné par Pollock, à partir de sa série de 1946 The sounds in the grass (Les sons dans l'herbe) et de la mise au point en 1947 de la technique du dripping, initiée dès 1943, consistant à faire dégouliner de la peinture sur de grandes toiles disposées au sol ou au mur. Pollock employait des outils non conventionnels pour peindre (couteaux, truelle, baton, seringue. Ce sera aussi le cas de De Kooning à partir de 1952 ou Franz Kline.

Le Colorfield Painting (champs colorés) désigne la peinture de Mark Rothko (1903-1970) depuis 1946 avec ses peintures « multiform », de Clyfford Still vers 1946 ou de Barnett Newman à partir de 1948. Rothko figure de larges bandes de couleurs pures dans de grands toiles qui invitent à la contemplation ou la méditation. Il voulait un art poignant et universel. Avec Barnett Newman, Clyfford Still et Ad Reinhardt, il devient l'un des artistes les plus représentatifs de la color field painting, qui est proche du minimalisme.

L'œuvre de Robert Rauschenberg (1925-2008) favorise le passage de l'expressionnisme abstrait au pop art avec ses combine paintings. Son approche fut parfois qualifiée de « Néo-Dada ». L'artiste américain refusait d'être rangé dans le courant du Pop Art ou celui de l'expressionnisme abstrait. Dans les années 1950, il s’installa ensuite à New York où il exposa ses monochromes. Il fit la connaissance de Jasper Johns, qui travaillait dans un atelier situé dans le même immeuble sur Pearl Street. Puis il se lança dans les collages sur des toiles expressionnistes appelés "Combine Paintings". Dans les années 1960, Rauschenberg explora l'emploi du métal comme support pour la peinture, l’émail et les images sérigraphiées. À partir de 1962, les peintures de Rauschenberg commencèrent à intégrer non plus seulement des objets trouvés, mais aussi des images - transférant des photographies sur des toiles au moyen de la sérigraphie. Ce procédé permet à Rauschenberg d'interroger le principe de la reproductibilité de l'œuvre et de ses conséquences.. Grâce à ce type de travail, il triomphe, et avec lui l’art américain, en obtenant le premier prix de la Biennale de Venise en 1964.

 


8 - Pop Art.

Le terme « pop art » (abréviation de « popular art » en anglais, ou « art populaire » en français) nait en réaction à l'expressionnisme abstrait jugé trop élitiste. Il puise ses origines dans le dadaïsme et dans l'œuvre de Marcel Duchamp. Jasper Johns et Robert Rauschenberg sont considérés comme des précurseurs du pop art. Ce mouvement artistique s'intéresse à la société de consommation et aux déformations qu'elle engendre dans notre comportement au quotidien. C'est à partir de ce principe que les artistes américains mettent en évidence l'influence que peut avoir la publicité, les magazines, les bandes dessinées, les affiches et la télévision sur les décisions des consommateurs. L'accueil est très bon dès les débuts du mouvement, car le pop art est a priori simple et accessible ; il semble remettre en cause le matérialisme. Les procédés utilisés par les artistes étaient souvent des nouveaux produits qui sortaient tout juste de cette société de consommation : acrylique, sérigraphie, etc. Les couleurs sont souvent vives et décalées par rapport à la réalité. Au-delà de la peinture, le pop art a usé des techniques picturales qui n'étaient auparavant pas considérées comme proprement artistiques, mais industrielles. Ce mouvement a perturbé le monde artistique d'autres manières, par exemple à travers la remise en cause du principe d'unicité d'une œuvre d'art. Le pop art utilise des symboles populaires, qui marquent l'inconscient dès l'enfance dans un but de désacralisation de l'œuvre d'art qui auparavant était réservée à une élite et qui ne couvrait que des sujets dit « importants ». Il représente des objets de la société consommation et de la culture populaire modifiés par la couleur, le format, la répétition ou encore intégrés au tableau par des collages.

Andy Warhol (1928-1987) est considéré comme l'un des chefs de file du pop art. Il représenta des marques, des personnalités médiatiques (Marilyn Monroe (1962), Liz Taylor, Elvis Presley, Jackie Kennedy). Il reproduisait ses œuvres par centaines, parfois même par milliers, ce qui heurtait les idées classiques attribuant à une œuvre sa valeur car elle est unique. Il utilisa la sérigraphie pour figurer des bouteilles de Coca-Cola, des portraits de Marilyn Monroe, des boîtes de soupe Campbell (Campbell's Soup Cans, 1962). Mais il réalisa aussi une série d'œuvres traitant de sujet plus dramatiques, comme les Chaises électriques, les Suicides et les Accidents de la route.

Les toiles de Roy Lichtenstein (1923-1997) s'inspirent fortement de la publicité et de l'imagerie populaire de son époque, ainsi que des "comics" (bandes-dessinées). Il décrira lui-même son style comme étant "aussi artificiel que possible". Il mit en valeur des icônes symboliques de l'American Way of Life comme le hot dog.

Tom Wesselmann (né en 1937) se distingua par ses grands nus féminins (Great American nude) et ses natures mortes (Still life), réalisées à partir de collages d'images découpées dans des magazines et d'objets trouvés. L'érotisme est constamment présent dans la série de ses Grands nus américains, composés dans des formes planes et simplifiées. Wesselman en souligne fortement la bouche, les seins, les hanches et les cuisses, à la façon d'images publicitaires. L'environnement en est quelconque, salon ou chambre où apparaissent cependant aux murs des portraits de personnages historiques américains (George Washington et Abraham Lincoln dans les Still life nr. 3 et 28 de 1963) ou des tableaux, notamment de Paul Cézanne, Matisse, Mondrian, Motherwell.

Jim Dine (né en 1935) refusait d'être assimilé au pop art bien qu'il aimât représenter des objets du quotidien. Souvent très colorées, ses toiles utilisent la technique du fondu (contours estompés) et des séries, avec une infinité de variations notamment dans les nuances chromatiques. Le motif du crâne, présent comme un rappel dans les toiles au milieu de nombreux objets banals et usuels du monde contemporain, renoue avec la tradition de la nature morte (A still life with a red pepper as October changes our valley, 1977).

James Rosenquist (né en 1933) juxtapose des images sans rapport apparent, et ne respecte pas les rapports d'échelle entre les objets (I Love You with My Ford, 1961). Influencé par son métier de peintre publicitaire, sur de très grands formats, comme les affiches de Broadway, sa perception des choses changera et il peindra des tableaux monumentaux et très colorés, des « fragments de réalité ».


9- Art minimal, art conceptuel.


144 carrés d'étain
Carl André, 1975
Untitled (To Donna 5a)
Dan Flavin, 1971
Plus ou moins
Frank Stella, 1964

L'Art minimal est contemporain du Pop Art mais choisit l'abstraction, le dépouillement, l'économie de moyens et la pureté. Héritier du constructivisme, ce style est un prolongement des recherches de Joseph Albers. Le minimalisme invite le spectateur à la méditation et se rapproche du zen. Il exprime les valeurs américaines fondamentales (le puritanisme des origines), de pragmatisme et de matérialisme dans une période de forte croissance économique. En réaction aux tableaux extrêmement colorés et aux objets quotidiens élevés au rang d'œuvres d'art par les artistes du Pop art, les œuvres minimalistes se composent généralement de deux ou trois couleurs et de formes basiques : ronds, carrés, lignes droites, etc. La simplicité est primordiale et il n'existe aucune représentation subjective derrière le minimalisme ; il est dénué de toute symbolique et ne cherche à jouer que sur les formes et les couleurs en évitant l'émotion au sens littéral du terme : un art dénué de tous sentiments subjectifs et objectifs.

Robert Ryman (né en 1930) s'illustre avec ses Charter series, des monochromes blancs ou noirs. Bien qu'il soit classé dans le mouvement du Minimalisme, l'artiste préfère être authentifié comme un "réaliste" car il n'est pas intéressé par la création d'illusions, mais seulement par la présentation des matériaux qu'il a utilisés dans ses compositions. Durant toute sa vie, il n'a cessé d'expérimenter les différents supports et privilégie le support carré. Il laisse quelques espaces non peints dans les coins de la toile. Les autres peintres du minimalisme américain sont Ad Reinhardt (Ultimate Painting n° 6, 1960, Centre Georges-Pompidou) et Frank Stella. Ce dernier est célèbre pour sa série de rapporteurs colorés et gigantesques (protactors). Sol LeWitt a produit des dessins simples tracés directement sur les murs du lieu d’exposition (Wall paintings). Mais le minimalisme inspira surtout des plasticiens et des sculpteurs (Robert Morris, Dan Flavin, Carl Andre, Sol LeWitt, Donald Judd qui peignit des monochromes sur d'autres supports que la toile).

Né dans les années 1960 à New York et à Londres, l'art conceptuel séduisit des artistes américains comme Robert Barry, Douglas Huebler, Joseph Kosuth, Lawrence Weiner. Son objectif est d'attirer l’attention sur les idées. Le conceptualisme marque l'aboutissement du minimalisme.


10 - Hyperréalisme, Néo-expressionnisme et Post-modernisme

Autoportrait,
Jean-Michel Basquiat, 1982
Doz Cabezas
Jean-Michel Basquiat, 1982
Balloon Dog,
Jeff Koons, 1994

La peinture américaine des années 1970 et 1980 se caractérise par une grande variété de styles et de méthodes. L'école de New York connaît alors un déclin relatif. La période est notamment marquée par le retour en force de la figuration et du réalisme. À la suite de Milton Clark Avery (1885-1965), considéré par certains comme le "Matisse américain", on trouve des artistes comme Philip Pearlstein (nus), Alex Katz (paysages et portraits) Jasper Johns (drapeaux, cibles), Larry Rivers (animaux, mariages, peinture d'histoire).

Dès la fin des années 1960 Chuck Close, Ralph Goings, Malcolm Morley, Audrey Flack, Don Eddy, Richard McLean, Richard Estes, David Parrish s'essayent à l'hyperréalisme et produisent une peinture du quotidien proche du trompe l'œil. Chuck Close (né en 1940) propose de gigantesques dessins de personnages patibulaires. Son premier tableau majeur, Big Nude, mesure 3 mètres de haut sur 6,5 de large. S'il a d'abord visé à la reproduction photoréaliste des visages, il expérimente depuis un certain temps avec la pixellisation. Don Eddy et John Salt s'intéressent aux automobiles, alors que David Parrish représente des motos (Motorcycle, 1971). Richard Estes (né en 1936) se distingue par l'aspect baroque et volontairement virtuose de ses compositions, jouant sur les reflets de toutes sortes et la fragmentation géométrique de l'espace (vues de vitrines, de cabines téléphoniques…). Les peintres new image tels que Jennifer Bartlett, Susan Rothenberg et Neil Jenney font également renaître la figuration.

Le néo-expressionnisme est un style de peinture contemporain qui a émergé vers la fin des années 1970 . Lié à l'abstraction lyrique américaine, il s'est développé en en réaction contre l'art conceptuel et minimaliste des années 1970. Les Néo-expressionnistes sont revenus à la peinture d'objets reconnaissables, tels que le corps humain, en adoptant un style violemment émotif, en utilisant des couleurs vives et des harmonies de couleur. Ils utilisent aussi un dessin cru de style bande dessinée pour provoquer. Julian Schnabel, David Salle, Robert Longo et Eric Fischl appartiennent à cette tendance. Le Bad Painting emprunte aux arts de la rue, (graffitis, pochoirs, affiches…) et s'inspire de cultures et idéologies marginales, (punk, rock, afro- américain, hispano-américain…). Volontairement sale et négligé, il est sur la lignée de la figuration libre et libérée. Jean-Michel Basquiat, Jonathan Borofsky, Buckley, Keith Haring, Rainer en sont les principaux représentants.

L'art de Jeff Koons relève du post-modernisme en étant le point de rencontre entre les ready-mades de Marcel Duchamp, les objets du quotidien démesurés de Claes Oldenburg, l'art conceptuel de Robert Smithson ou Dan Flavin et le pop art d'Andy Warhol.

 

Bibliographie :

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