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En 1910, dans les environs du petit village de Vandorf, Bruno Heitz, un jeune artiste, est retrouvé pendu dans les bois. Comme il est tenu pour responsable de la mort de sa fiancée, les autorités classent l'affaire. Venu enquêter dans la région, son père se heurte à l'hostilité de Kanof, le chef de la police locale, et à celle de Namaroff, le chirurgien du cerveau qui délivra le permis d'inhumer. Ce que le professeur Heitz ne tarde pas à découvrir, c'est que la région est hantée par Mégara, la légendaire Gorgone, qui change en pierre tous ceux qui voient son visage.
Heitz devient sa victime dans les ruines du château Borski. Mais, avant de mourir, il a le temps d'écrire une lettre pour son second fils Paul. Ce dernier arrive à son tour, suivi peu après par le professeur Carl Meister, dont il est le collaborateur. Tandis que Paul tombe amoureux de Carla Hoffmann, la jolie assistante de Namaroff, lequel refuse de le recevoir, le professeur Meister soupçonne la vérité : les crimes de la Gorgone ont commencé cinq ans plus tôt et Carla, amnésique, est au service de Namaroff depuis la même période. Son corps abrite la terrible Gorgone, dont les instincts meurtriers s'éveillent les nuits de pleine lune. Dans les ruines du château Borski, Paul tue Namaroff avant d'être changé en pierre. Mais le professeur Meister parviendra à décapiter le monstre.
La Gorgone est marqué par le retour de Fisher à la Hammer, au terme d'une absence de dix-huit mois pendant laquelle il tourne en Allemagne Sherlock Holmes et le collier de la mort (1962) et The Horror of It All (1963) pour Lippert Films. Son précédent film pour le studio, Le fantôme de l'opéra (1962) n'a connu qu'un succès mitigé et des critiques dubitatives, loin de Frankenstein s'est échappé (1957), Le cauchemar de Dracula (1958) ou La malédiction des pharaons (1960). Fisher souhaite donc un sujet nouveau et préfère s'orienter vers la poésie et le fantastique plus que vers l'horreur pure. Le film sort aussi des stéréotypes de l'horreur parce qu'il n'y coule pratiquement pas une goutte de sang, à la place, il n'y a que la pierre.
La Gorgone regarde ainsi en direction de La féline, La malédiction des hommes chats et Vaudou des longs-métrages qui, aux démonstratives productions Universal des années 30, préfèrent la suggestion. La Gorgone raconte d'ailleurs la même histoire que La féline. Dans les deux cas, il s'agit d'une femme, victime d'une malédiction ancestrale, qui se transforme en une créature belliqueuse sans en être pleinement consciente.
Mieux encore que dans Les deux visages du docteur Jekyll (1960), Fisher souhaite nuancer le discours conventionnel sur le bien et le mal, rendre compte des ambiguïtés d'une personnalité,des déchirements d'une âme, partagée entre le bien et le mal.
Pour les effets spéciaux, il est fait appel à Roy Ashton, le grand expert des effets spéciaux de maquillage de la Hammer, l'auteur de la momie de La malédiction des Pharaons et de la transformation d'Oliver Reed en lycanthrope dans La nuit du Loup-Garou. Il prend pour modèle de méduse la célèbre sculpture de Cellini, sa tête tranchée tenue à bout de bras. Il entreprend une sorte de perruque faite de reptiles sculptés dans le bois et attachés à des lanières de cuir. Même avec un éclairage adapté, cela ne convainc pas le producteur qui se tourne vers Syd Pearson pour une réalisation plus rapide. Il imagine un dispositif qui permettait à une quinzaine de serpents de surgir d'une chevelure noire manoeuvrés à distance par cinq câbles prolongés par des bouts de fils très fins, tous connectés à une boîte de commande placée à presque un mètre derrière elle. Pour le rôle de Méduse, Barbara Shelley était prête à tourner avec de vraies couleuvres car elle en avait l'habitude. Le producteur décide néanmonins de confier le rôle à Prudence Hyman qui aura la lourde charge de porter la perruque de près de trois kilos. Qui plus est, lors du tournage de la décapitation du monstre, l'addition de deux erreurs va l'exposer au risque de perdre sa tête quand l'épée s'approche trop près et qu'elle oublie de baisser la tête : la prise sera refaite par un mannequin. Tout ceci contribue hélas à rendre bien peu crédible cette histoire.