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L'Épiphanie est par ordre d'importance dans l'année liturgique catholique la quatrième des cinq fêtes cardinales appelées ainsi car elles dirigent l'office d'un certain nombre de dimanches qui les suivent. Moins importante que Pâques, Noël, ou la Pentecôte, elle précède toutefois l’Ascension.

L'Adoration des mages, l'Epiphanie est en effet un événement considérable : non seulement la puissance et la richesse du monde s'agenouillent devant la pauvre humilité du sauveur mais, en rassemblant devant Marie et Jésus, moins d'un mois après sa naissance, des mages (rois, astrologues ou magiciens) venus des trois continents alors connus, l'épiphanie (du grec "se manifester, apparaître, être évident") signe la reconnaissance universelle de l'Incarnation, de la divinité humaine du Christ. Le thème est ainsi souvent traité avec une grande somptuosité.

Seul Matthieu parle des mages dans son évangile :

"Jésus étant né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode, voici que des mages venus d'Orient arrivèrent à Jérusalem en disant : "Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu, en effet, son astre à son lever et sommes venus lui rendre hommage." L'ayant appris, le roi Hérode s'émut, et tout Jérusalem avec lui. Il assembla tous les grands prêtres avec les scribes du peuple, et il s'enquérait auprès d'eux du lieu où devait naître le Christ. "À Bethléem de Judée, lui dirent-ils ; ainsi, en effet, est-il écrit par le prophète :
"Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n'es nullement le moindre des clans de Juda ; car de toi sortira un chef qui sera pasteur de mon peuple Israël."
Alors Hérode manda secrètement les mages, se fit préciser par eux le temps de l'apparition de l'astre, et les envoya à Bethléem en disant : "Allez vous renseigner exactement sur l'enfant ; et quand vous l'aurez trouvé, avisez-moi, afin que j'aille, moi aussi, lui rendre hommage." Sur ces paroles du roi, ils se mirent en route ; et voici que l'astre, qu'ils avaient vu à son lever, les précédait jusqu'à ce qu'il vînt s'arrêter au-dessus de l'endroit où était l'enfant. À la vue de l'astre, ils se réjouirent d'une très grande joie. Entrant alors dans le logis, ils virent l'enfant avec Marie sa mère, et, se prosternant, ils lui rendirent hommage ; puis, ouvrant leurs cassettes, ils lui offrirent en présents de l'or, de l'encens et de la myrrhe. Après quoi, avertis en songe de ne point retourner chez Hérode, ils prirent une autre route pour rentrer dans leur pays.

A l'image des orientaux, les mages se prosternent devant l'Enfant. Mais la prosternation orientale sera vite remplacée par une génuflexion du premier roi, le plus âgé, qui baise le pied de Jésus, vrai enfant roi porté par sa mère. Comme il y a trois présents : l'or, la myrrhe, et l'encens, on a vite fixé leur nombre à trois. Les trois rois mages correspondent souvent aux trois âges de la vie. Et comme le nom de mage est péjoratif, ils deviennent des rois puissants qui portent une couronne.

Reste à différencier ces rois. Les noms Balthazar, Melchior et Gaspard sont trouvés dans des évangiles apocryphes. Comme ils sont trois, ils peuvent représenter les trois âges de la vie : la jeunesse, la maturité et la vieillesse. Le plus vieux passe en premier et le plus jeune, Gaspard en dernier. Il est souvent ainsi un peu isolé.

Les trois rois mages représentent aussi les trois continents connus avant les grandes découvertes : l'Europe, l'Asie et l'Afrique. Gaspard est le roi noir venu d'Afrique. Le premier à en avoir peint est Rogier van der Weyden vers 1460. Le Noir avait traditionnellement une valeur négative, diabolique dans la peinture chrétienne, il y tenait le rôle d'esclave ou de bourreau. Son accession au rang prestigieux de roi mage provient de la situation géopolitique de la chrétienté. En prenant Constantinople en 1456, les Turcs ont coupé la route de Jérusalem par le nord et, pour espérer accéder au centre spirituel du monde, il faut contourner l'obstacle par le sud. On voit alors se réactiver le mythe ancien de ce royaume chrétien situé en Afrique au sud de l'Egypte et d'une richesse immense habité par des noirs et gouverné par le mystérieux prêtre Jean.

Sources : Daniel Arasse, On n'y voit rien

Jusqu'à la fin du IVe siècle, l'Épiphanie est la grande et unique fête chrétienne "de la manifestation du Christ dans le monde", manifestation exprimée, d'abord, par la venue des mages, ainsi que par différents épisodes : la Nativité, la voix du Père et la présence d'une colombe lors du baptême sur le Jourdain, le miracle de Cana, etc.. La date de l'Épiphanie se substitue à la fête païenne romaine des Saturnales où durant sept jours la hiérarchie sociale et la logique des choses peuvent être critiquées sinon brocardées et parodiées. Elle se substitue plus généralement à toutes les fêtes de la lumière de l'Antiquité, généralement le 6 janvier, date à laquelle l'allongement de l'ensoleillement est perceptible.

Depuis l'introduction d'une fête de la Nativité (Noël) le 25 décembre, des Pères de l'Église comme saint Jean Chrysostome fixent des traditions pour commémorer, le même jour, trois événements : l'Adoration des mages, le Baptême dans le Jourdain trente ans plus tard et les Noces de Cana trente-et-un ans plus tard. Dès le Moyen Âge, la liturgie chrétienne a rassemblé ces trois événements mais la piété et l'art chrétiens ont privilégié l'Adoration des mages. Cette date est alors fixée le 12e jour après la naissance du Christ (le 25 décembre) soit le 6 janvier. C'est une date fériée.

Pour les catholiques, depuis 1971, dans les régions où l'Épiphanie n'est pas un jour férié, elle peut se fêter, et notamment se rendre à la messe, le deuxième dimanche après Noël (c'est-à-dire le premier dimanche qui suit le 1er janvier). C’est le cas en France qui connaît d’ailleurs cette exception depuis 1802 : le Concordat n’ayant conservé que quatre fêtes chômées (Noël, Ascension, Assomption, Toussaint), les autres fêtes de précepte avaient été déplacées au « dimanche le plus proche » par un décret du cardinal Caprara, légat du pape Pie VII. Diverses coutumes sont observées à cette occasion. En France, en Suisse et en Belgique, depuis le Moyen Âge, une « galette des rois » ou un « gâteau des rois », pâtisseries contenant une fève, sont partagées ce jour-là ; celui ou celle qui trouve la fève dans sa part est surnommé "roi" ou "reine" . Par sa forme ronde et sa couleur dorée, la galette des rois, partagée à l’Épiphanie, symbolise le soleil, retrouvant par là la notion de la fête de la lumière sous l'Antiquité.

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