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A tout de suite

2004

Genre : Road movie

D’après une histoire vécue par Elisabeth Fanger, J’avais dix huit ans (Ed. Ramsay). Avec : Isild Le Besco (Lili), Ouassini Embarek (Bada), Nicolas Duvauchelle (Alain), Laurence Cordier (Joëlle), Fotini Kodoukaki (l’amie grecque), Leonor Graser (l’amie parisienne), Emmanuelle Bercot (Laurence), Odile Vuillemin (la sœur), Catherine Davenier (la mère), Nicolas Pignon (le père). 1h35

La France des années 70. Lili, étudiante des beaux-arts de dix-neuf ans, vit dans un appartement bourgeois parisien avec son père et sa grande sœur. Elle héberge en douce sa copine de classe.

Lili s'ennuie passablement et croise un jour Bada dans un bar. Il lui tape dans l'œil, et elle veut le revoir. Lili le dessine tout de suite. Elle le retrouve le soir même, et c'est le coup de foudre. Leur aventure commence.

Seulement voilà, Bada prend part à un hold-up qui tourne mal. Il débarque chez Lili avec son pote Alain. Ensemble, ils doivent prendre la fuite. Lili se joint à eux et à la copine d'Alain. Ils partent se cacher là où ils peuvent avec leur butin : en Espagne, au Maroc puis en Grèce....

Tourné en noir et blanc et en numérique, le film embarque pour une aventure en plusieurs étapes. C'est d'abord une chambre, des couloirs et des cafés à Paris. Puis Lili qui vit à cent à l'heure après avoir prononcé le fameux "à tout de suite" au téléphone avant de s'effondrer en Grèce, liens sensori-moteurs brisés, puis de renaître progressivement à la vie.

Ce n'est pas parce qu'il s'agit de deux enfants qui s'aiment confrontés à un braquage trop grand pour eux qu'il faut s'attendre à une version moderne des Amants de la nuit. Même s'il évoque parfois à Nicholas Ray, c'est bien plutôt à Rossellini que fait penser A tout de suite. Le regard d'Isild Le Besco rejoignant souvent celui d'Ingrid Bergman dans son interrogation sur le sens de ce qu'elle voit, de ce qu'elle est en train de vivre.

D'emblée, la voie off nous avertit que l'histoire se raconte au passé. Il s'est déjà passé quelque chose qui n'est plus. Le film démarre pourtant dans la légèreté. Il suffit de pousser, de jour, la porte d'un club parisien. Il suffit d'un échange de regards dans ce lieu inhabituel pour que le coup de foudre s'établisse. Précipité dans un dessin au fusain, cet amour se déclare avec une belle évidence au couple et à tous ceux qui l'entourent.

Le deuxième acte décrit la cavale des amants. Comme elle aime d'évidence, Lili fuit Paris sans la peur qui a saisi son amant dès le meurtre. Lili ne réfléchit pas. Elle court, elle regarde, elle dessine. Ce qu'elle voit à la corrida, elle ne le sait pas très bien. Son visage, son regard se tendent vers la recherche d'une compréhension du monde. Cette fuite ralentit pourtant progressivement son rythme, épuise le mouvement de départ jusqu'à cet hôtel chic au Maroc. Les vacances se révèlent une prison.

Les signes avant coureur de l'effondrement se manifestent dans l'avion. Alors que son amant, malgré les difficultés, reprend vie, c'est elle qui s'effondre. A l'aéroport d'Athènes, dans une magnifique scène, elle ne voit plus, elle n'entend plus. Elle regarde, hébétée, s'éloigner ses compagnons qui la pensent observée par la police.

S'ensuit une troisième partie plutôt amusante malgré la tragédie qui guette Lili. D'abord gentiment pris en charge par un libanais, elle suscite la concupiscence d'un quinquagénaire libidineux qui lui permet, en fait, de retrouver la logique de la fuite. Ensuite c'est le réveil du corps : sur la plage, dans un lit avec sa compagne de chambre ou dans une boite de nuit avec deux garçons. Puis l'acceptation de la vie comme elle est : triste pour qui ne connaît plus l'amour. Lili ne dessine plus. Reste alors le soleil, celui du club Med, pour repartir du vide.

Jean-Luc Lacuve le 01/12/2004

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