Les deux amis

Clément, figurant de cinéma, est fou amoureux de Mona, vendeuse dans une sandwicherie de la gare du Nord. Il ignore que Mona, vit en semi-liberté la journée mais doit regagner la prison le soir. Clément désespère de maintenir même une relation ténue avec elle. Mona vient de refuser son cadeau d'oiseau dans une cage ! 

Clément demande alors  à son seul et meilleur ami, Abel, de l’aider. Abel, écrivain en devenir, est pompiste dans un garage sous-terrain. Hâbleur, volontiers ombrageux, il interpelle sans ménagement Mona sur sa froideur hors de propos trouve-t-il, envers son ami. Il encourage aussi Clément à retenir Mona pour la soirée à Paris. Quand Clément ne se décide pas, c'est lui qui pousse Mona au dernier moment hors du train... qui part sans elle.

Mona est furieuse mais, succombant d'emblée au charme d'Abel, décide de prévenir sa responsable de liberté conditionnelle qu'elle ne pourra rentrer ce soir. Clément a justement des rôles de figurants dans un film sur Mai 68 à leur proposer. Dans le feu de l'action, il déclare sa flamme à Mona qui le repousse. De désespoir, il s'ouvre les veines. Conduit à l'hôpital, il confie à Mona et Abel le soin de nourrir son oiseau.

Les deux jeunes gens s'arrêtent dans un café ou Mona danse puis dans une église où, devant une vieille bigote, Mona déclare à Abel être amoureuse de lui.  Ils passent la nuit ensemble mais Abel a des remords et jette Mona à la rue pour aller retrouver Clément.  Ensemble, les deux amis se lancent à la recherche de  Mona. Mais Clément comprend vite qu'Abel lui ment et le méprise en le traitant comme un enfant. Il le trouve désormais toxique pour lui et décide de rompre leur relation amicale.

C'est alors que surgit de nouveau Mona qui, après avoir passé la journée aux bains-douche, les retrouve sur le palier d'Abel. Se sentant maitre du jeu amoureux où chacun des deux "ex" mais toujours amis se cherche, elle reprend goût à la vie. Elle donne son adresse pour que la police la ramène en prison. Abel et Clément continuent de se mentir entre eux et sur eux mais sont unis dans leur amour pour Mona.

Le film est inspiré des Caprices de Marianne mais l'analogie est encore plus lointaine que celle revendiquée par Jean Renoir pour La règle du jeu. Ici Abel trahi Clément en succombant, la nuit lorsque son ami est à l'hôpital, aux avances de Mona. Il n'est pas davantage question à la fin, Clément étant toujours vivant, de renoncer à Mona. On a plutôt là une nouvelle variation sur la confusion des sentiments et la possibilité, rare, de la constitution d'un ménage à trois.

Car, c'est peut être là le pari le plus risqué du film que d'instituer par une forme de trahison de la forte liaison amicale (la scène de ménage amicale en étant le summum) la possibilité d'un ménage à trois. Mona accepte le désir d'Abel car elle a trouvé une forme d'équilibre dans ce triangle qui lui donne la force de sortir affronter le monde extérieur à la prison.

Jean-Luc Lacuve le 28/09/2015