Tiresia, une transsexuelle brésilienne d'une grande beauté, vit clandestinement avec son frère dans la banlieue parisienne. Terranova, un esthète à la pensée poétique, l'assimile à la rose parfaite et la séquestre pour qu'elle soit sienne. Privée de ses hormones quotidiennes, Tiresia va petit à petit se transformer devant ses yeux. Impuissant face à ce qu'est devenue sa rose, Terranova va l'aveugler et la jeter à l'orée d'une banlieue voisine. Tiresia est alors recueillie dans un piètre état, mi-homme, mi-femme, par Anna, une jeune fille simple et sauvage qui prendra soin d'elle. Pendant sa convalescence naîtront chez Tiresia des dons de prédiction. Mais la présence d'un oracle gêne l'Eglise, et le prêtre de la paroisse ne peut faire autrement que de se confronter à Tiresia.
Ce film où le travail du spirituel est essentiellement incarné ne peut manquer de faire penser à Robert Bresson, un Bresson qui aurait recueilli l'héritage de Pialat (la présence des corps) et de Garrel (les acteurs).
Le personnage du prêtre, François, était au départ distinct de celui de Teranova qui séquestre Tiresia. Cette fusion fait beaucoup gagner au film qui parvient à transposer dans l'humain sa première séquence où la lave coule lentement tout en bouillonnant et en mélangeant ses couches. On sent pareillement à l'œuvre le désir d'une autre vie sous le silence d'Anna (Mouchette), le Brésil sous le bois de Boulogne, les hormones féminines sous l'homme travesti, les gouffres de douleurs sous la tranquillité provinciale, la spiritualité sauvage sous les petites affaires de l'église chrétienne (Le journal d'un curé de campagne, Sous le soleil de Satan).
L'histoire de Tiresia appartient à la mythologie grecque. Durant sa vie, Tiresia fut homme et fut femme. Aveuglé(e) par la rage d'une déesse, les dieux lui concédèrent une vision supérieure.