Ce tableau décrit une rue animée de Paris avec six personnages, trois femems, deux enfants, un homme qui occupent le premier plan. Une foule derrière eux ferme presque complètement la perspective sur le boulevard. Le quart supérieur de l'image est principalement rempli d'au moins une douzaine de parapluies.
Ce tableau est le dernier des tableaux verticaux à grande échelle de la vie moderne peint par Renoir avant qu'il se tourne vers des sujets moins évidemments contemporains tels que les paysages, les nus et les portraits. Il est également significatif d'un changement dans l’art de Renoir.
Au moment de peindre ce tableau, Renoir était en train de gagner la reconnaissance d'un petit cercle de mécènes et de collectionneurs. Il commençait également à réévaluer son art et sa relation avec l'impressionnisme. Comme il l'a dit plus tard au marchand d'art Ambroise Vollard : "J'étais arrivé à la fin de l'impressionnisme et j'arrivais à la conclusion que je ne savais ni peindre ni dessiner. En un mot, j'étais dans une impasse."
Comme d'autres artistes impressionnistes, Renoir avait travaillé en appliquant des touches rapides de couleurs vives, souvent non mélangées, pour créer des surfaces chatoyantes lumineuses. Cette méthode était particulièrement adaptée aux paysages de plein air mais il cherchait également plus de structure et de clarté de forme. Il cherche ainsi «l’enseignement des musées», développant une admiration particulière pour Ingres, en particulier pour ses dessins. Lors d'un voyage en Italie de 1881 à 1882, il est inspiré des fresques de Raphaël à la Villa Farnesina de Rome et des anciennes peintures murales romaines de Naples. Il croit alors que l’art classique possède une «pureté et une grandeur» qui manquent à son propre travail. Cette perception est peut-être renforcée par le d’un long séjour avec Cézanne en Provence à son retour.
Non seulement Les parapluies sont peints pendant cette période de réévaluation artistique, mais ils ont été produits en deux étapes avec un écart d'environ quatre ans entre la première (probablement 1880–1) et la seconde (1884–5). Après avoir mis le tableau de côté, Renoir le termine pour l'inclure dans la grande exposition de peinture impressionniste qui doit ouvrir à New York en avril 1886.
Les parapluies possède ainsi deux styles distincts. Au cours de la première étape Renoir peint le groupe de droite qui comprend une mère et ses deux filles et la femme de profil au centre qui lève les yeux en ouvrant son parapluie. Ces personnages, présentés côte à côte, sont peints de manière impressionniste. Renoir utilise de délicates touches de pinceau, de riches tons lumineux de bleu, vert et orange, qui évoquent l'éclat du velours et les textures des vêtements et de la dentelle. Leurs traits du visage, doux, ne sont pas clairement définis et Renoir évite les contours nets.
Les personnes à gauche du tableau, y compris la jeune femme de plein pied tenant un panier et l'homme qui se tient derrière elle ont été peint à l'origine en utilisant un pinceau léger. À cette première étape, la femme au panier portait également un chapeau. Renoir a ensuite repeint le groupe, abandonnant la technique douce pour un style plus linéaire. Les personnages ont ainsi des contours clairement définis et des traits dessinés avec précision. L'attention que Renoir porte à Ingres est également évidente dans les contours fluides de la tête et du torse de la jeune femme. Le pinceau de ce côté de la toile est plus uniforme et contribue à créer un sentiment de forme tridimensionnelle. La longue robe gris-bleu de la femme de gauche (avec ses échos de Cézanne) est également beaucoup plus structurée. Ses plis et ses lignes sont plus clairement décrits que les robes bleues des femmes du centre, qui se fondent presque l'une dans l'autre.
Les changements de la mode féminine fournissent également une preuve claire de l'intervalle de quatre ans qui s'est écoulé pour terminer le tableau. Les personnages de droite portent des vêtements qui sont à la mode de 1881 et le sont encore l'année suivante. La robe de la jeune femme de gauche, qui est très différente avec une coupe et des lignes plus sévères, n'est devenue en revanche à la mode que vers 1885. Comme Madame Moitessier d'Ingres, les femmes de Renoir portent les dernières tendances (une lithographie de son taleau Sur la terrasse a été utilisée pour illustrer un magazine de mode en 1882).
Un examen technique approfondi, dont les rayons X, a fourni des preuves supplémentaires sur les différences stylistiques entre les deux moitiés du tableau. Non seulement la sous-couche des deux groupes est complètement différente, mais leurs surfaces de peinture ont également été élaborées de manière très distincte. Les personnages de droite n'étaient initialement indiqués que de façon très vague avant d'être progressivement affinés. Les figures et les formes sur la gauche étaient en revanche clairement définies dès le départ, et Renoir a également apporté un certain nombre de modifications au fur et à mesure de l'avancement des travaux. Il a même changé son choix de couleur, remplaçant le jaune chrome et le bleu cobalt (ses pigments préférés du milieu des années 1870) par du jaune de Naples et de l'outremer, qui ont produit les tons gris ardoise qui sont particulièrement visibles dans les parapluies.
Difficile d'expliquer les raisons pour lesquelles Renoir n'a pas gommé les divergences du tableau avant de le montrer. Elles étaient évidentes pour les admirateurs contemporains et a également nui à son prix de vente. Renoir le vend ainsi à Durand-Ruel en 1892 pour un prix très modique pour un tableau de cette taille. Peut-être pensait-il que chaque groupe était une réussite à part entière.