Le 8 février 1937, Malaga, la ville natale de Picasso, est prise par les troupes nationalistes. En l'espace de quelques jours, les 10, 12 et 18 février, Picasso peint trois inquiétantes scènes de plage où dominent de monumentales baigneuses. Il reprend ainsi le thème des baigneuses, déjà développé à la fin des années 1920. Thème qu'il déclinera uniquement en sculptures peu après. Au lieu de jouer à la balle ou de sauter dans les airs, les baigneuses sont désormais repliées sur elles-mêmes, leurs corps s'inscrivant dans un ovale.
Cette série est encore inspirée par la figure de Marie-Thérèse Walter, muse et compagne omniprésente dans l'œuvre des années 1930, alors que Picasso commence à vivre avec Dora Maar avec qui il passe les étés 1936-1937. Picasso déforme les corps et fait le choix d'une palette minérale. Les paysages sont réduits à quelques traits. Toute l'attention se concentre sur ces figures monstrueuses, nourries par les dialogues que Picasso entretient avec les surréalistes Man Ray et Paul Éluard.
Le tableau présente une baigneuse nue sur une plage se livrant à un geste familier. L'exagération des volumes et le rejet de toute vraisemblance anatomique sont frappants : les pieds et les mains sont disproportionnés par rapport au visage impersonnel. Les contours tracés au fusain donnent encore plus de densité au corps, alors que le modelé est souligné par le pastel blanc. La frontalité appuyée du personnage fait ressortir l'espace en arrière-plan comme une simple toile de fond. Un dessin à l'encre de chine (Paris, musée Picasso), daté lui aussi du 10 février, révèle que l'artiste a rapidement esquissé la composition. La baignade, peinte deux jours plus tard, reprend la cette figure, tenant un petit bateau à voiles, associée à une autre baigneuse alors que La grande baigneuse au livre du 18 février reprend dans un format vertical une unique figure de femme.
Pour Picasso, l'année 1937 sera celle de Guernica, exécuté en juin pour le pavillon espagnol de l'Exposition internationale.