L'art nouveau est l'un des grands mouvements post-impressionnistes. Le terme "Art Nouveau" fut employé dans les pays de langue anglaise et de langue française pour désigner le style qui se développa en Europe et aux Etats-Unis entre 1890 et 1905. Il a pour origine le nom que Siegfried Bing, marchand d'art ancien chinois et japonais, donna le 26 décembre 1895 à sa boutique parisienne du 22 rue de Provence, lorsqu'il en consacra une partie à l'art européen contemporain. Dès leur création, les galeries Bing furent un lieu de rencontre pour les artistes de toutes nationalités et l'un des symboles de ce nouveau style international. Les très nombreuses revues créées à cette époque contribuèrent à la diffusion rapide d'œuvres nouvelles.
L'Art nouveau se désigne aussi par des qualifications péjoratives "style nouille" ou par des noms se rapportant à un artiste précis "style Horta" ou à une réalisation précise "style métro". Il est très tôt question de "Modern style", ce qui implique, en France, le sentiment d'une influence anglaise, ou de "stile inglese" en Italie, où l'on emploie également les dénominations de "stile floreale" ou de "style Liberty" du nom d'un célèbre marchand anglais.
L'art nouveau combat d'abord l'éclectisme historiciste qui règne paresseusement à la fin du XIXe. A cette époque, la copie des styles de tous les temps et tous les pays était considérée comme une garantie de vente par les industriels en pleine possession de moyens techniques permettant d'imiter, en les abâtardissant, n'importe quelle matière, n'importe quel décor. C'est ainsi d'abord dans l'architecture que se developpe l'art nouveau avec Antonio Gaudi en Espagne, Victor Horta en Belgique et Charles Rennie Mackintosh en Ecosse.
L'utilité du décor n'est pas mise en doute par L'art nouveau. Bien au contraire, mais il affirme sa volonté de construire un idéal de beau, raffiné et bourgeois avec une volonté d'honnêteté du travail, du respect de la matière, classique ou moderne, et de la fonction de l'objet.
Malgré la diversité des oeuvres et des caractères nationaux persistants, un certain nombre de traits communs caractérisent l'Art nouveau : le culte de la ligne, la forme organique de la plante et l'ornement comme symbole de la structure. On met l'accent sur la courbure de la tige des joncs ou des roseaux, sur les ondulations des algues. Le bouton de fleur, le bourgeon sont des symboles de l'avenir. L'arbre fait aussi partie du répertoire comme symbole de fécondité. La blancheur du lys, comme celle du cygne est symbole de pureté. Flore et faune aquatiques, insectes légers, comme la libellule, serpents sont choisis aussi pour leurs effets décoratifs.
Les Belges font figure de pionniers avec la revue l'Art Moderne, fondée en 1881, où s'expriment Henry van de Velde et l'architecte Victor Horta. Celui-ci construit L'hôtel Tassel (1893), considéré comme le premier édifice Art nouveau au monde. Les nouveaux matériaux industriels sont intégrés à l'architecture domestique et urbaine tout en exprimant la volonté de donner au monde moderne un visage harmonieux par l'utilisation de l'arabesque, symbole de féminité et d'énergie. Les chefs d’œuvre vont se succéder : Hôtel Solvay (1898), La maison du Peuple (1899), sa propre maison, l’actuel Musée Horta (1901), les magasins A l’Innovation (1903), Les magasins Waucquez (1906).
Parait à Vienne Ver sacrum (1898-1903), organe de la Sécession, association fondée en 1897, présidée par Gustav Klimt et dont le nom reste attaché à la variante autrichienne de l'Art nouveau.
Plus populaire est l'hebdomadaire munichois, satirique, littéraire et artistique : Jugend. Le journal est illustré par les vignettes florales d'Otto Eckmann et est à l'origine du terme "Jugendstil", qui désigne en Allemagne le nouveau mouvement. C'est à son imitation que fut fondée à Barcelone la revue Joventut, à laquelle Picasso collabora à ses débuts, témoignant du modernisme de la ville, où s'édifiaient les constructions d'Antonio Gaudi (1852-1926).
En Angleterre, ces idées de l'unité de l'art s'étaient développées depuis le milieu du siècle avec les Préraphaélites. Les quatre numéros de The Germ, parus en 1850, s'intéressaient aux tissus, au mobilier et à la création de motifs industriels nouveaux. En 1888 le mouvement Arts and Crafts organise des expositions spécialisées dans l'artisanat d'art. Par le retour à l'artisanat, William Morris, comme Ruskin, voulaient supprimer les méfaits de "l'éclectisme". La revue anglaise The Studio, traduite en français dès 1893, se pose comme l'initiatrice et la propagatrice du mouvement .
A Paris, les arts appliqués apparaissent en 1891 au salon du champ de Mars organisé par la Société nationale des beaux-arts. La même année le salon des Indépendants présente trois céramiques de Gauguin et un ensemble décoratif de Bonnard. En 1893 la Société des artistes français, héritière du vénérable Salon officiel, accueille timidement une rubrique "Objets d'art" transformée en "Art décoratif" à partir de 1895. Les revues Art et décoration et L'Art décoratif paraissent en 1897 et en 1898. On y retrouve certaines formules mises à la mode par The Studio, comme les concours pour la création d'objets usuels. Une des préoccupations du moment est en effet le renouveau de l'architecture et des arts décoratifs, et l'on assiste à la réhabilitation de ces derniers qui sont accueillis dans les expositions jusqu'ici réservées aux arts nobles. Cette réforme devait aboutir à un nouveau style mais pas au résultat social attendu. Avoir perdu de vue les idées sociales sur le beau à la portée de tous, en produisant des objets faits à la main et d'un luxe raffiné est l'une des raisons du déclin rapide de l'Art nouveau. D'ailleurs d'autres tendances, essentiellement liées à l'architecture et à son renouveau fonctionnel, déjà défendu par Violet-le-Duc, se font jour à cette époque et proposent une solution industrielle. Cette mentalité "Art nouveau" rassemble au sens large : les Nabis, la deuxième génération de symbolistes, les post-impressionnistes, Gauguin décorateur, le cloisonnisme et les affiches de Toulouse-Lautrec et d'Alfons Mucha.
En Angleterre même, Charles Robert Ashbee (1863-1942), architecte et décorateur, membre du mouvement Arts and Crafts, proclame que la civilisation moderne repose sur la machine, cette dernière étant pour l'Américain Frange Lloyd Wright (1869-1959), "le précurseur de la démocratie, qui est notre espoir le plus cher". Déjà, dans cet esprit, l'ornementation n'est plus nécessaire, aussi bien à l'Américain Louis Sullivan (1856-1924) en 1892 qu'à l'Allemand Adolf Loos (1870-1933) qui déclare en 1902 que "l'ornement est un crime".
L'accueil fait à l'Art nouveau dans les grandes expositions
internationales est significatif de cette évolution : à Paris en 1900, le style
français a un brillant succès, tant avec le pavillon de Bing, qu'avec les
dernières créations de Gallé, chef de l'école de Nancy. Mais en 1902 à Turin
où les pays autres que la France sont mieux représentés qu'en 1900, un style
plus simple, plus linéaire, plus géométrique, où la sobriété exclut presque
le décor, est la caractéristique des produits écossais, anglais, belges et
surtout allemands et autrichiens: Olbrist (1867-1908), Behrens (1868-1940),
Hoffmann (1870-1956) y représentent la nouvelle tendance. En 1905 à Liège,
la France ne présente rien et, en 1908, à Londres, il n'y a plus trace de
l'Art nouveau.
Dans l'entre-deux-guerres se dessine une tendance à la simplification et à la stylisation des formes et de l'ornementation qui sera consacré en 1925 lors de l'Exposition internationale des Arts décoratifs de Paris. "L'Art Déco" se caractérise par l'usage de formes massives et géométrisées, exaltées par une multitude de parements : jeux de briques, enduits savants, marbres, carreaux de céramique. Précieuse par ses textures, plastique par ses formes, la façade Art Déco joue en outre sur les couleurs franches et contrastées de ses châssis. L'Art Déco, continue d'affirmer la nécessité de l'ornement face aux modernistes radicaux. C'est la voie que choisit Victor Horta lorsqu'il construit le Palais des beaux-arts de Bruxelles (1928).