L'été. Isabelle et son jeune frère, Victor, passent leurs vacances sur la côte d'Azur avec leur mère, Sylvie et son compagnon, Patrick, ainsi que leurs amis proches, Véro et Peter, qui ont deux jeunes enfants. Félix, un ami allemand d'Isabelle, l'invite pour une soirée et, sur la plage, lui fait l'amour pour la première fois de façon mécanique, brève et sans passion. Humiliée de n'avoir éprouvé aucun plaisir, Isabelle abandonne sans regret Félix à la fin de l'été.
L'automne. Isabelle a rendez-vous chambre 6095 d'un hôtel de luxe pour une passe qu'elle a négocié 300 euros. L'homme, Georges, est âgé mais, attendri par la beauté d'isabelle, qui se fait appeler Léa, aimerait la revoir. Isabelle ramène les billets de 100 euros chez elle qui rejoignent ceux déjà accumulés. Elle fixe des rendez-vous par téléphone pour des hommes qui se montrent souvent vulgaires mais dont elle obtient presque toujours les sommes demandées. Ni son frère ni son amie Claire du lycée Henri IV ne se rendent compte de sa double vie. Un soir au théâtre, elle croise Georges qui la rappelle pour un nouveau rendez-vous le lendemain. De plus en plus seule, Isabelle aime retrouver Georges mais celui-ci, qui doit prendre du viagra, décède brusquement d'une crise cardiaque en lui faisant l'amour. Isabelle, choquée, se blesse au front et quitte précipitamment l'hôtel.
L'hiver. Des policiers apprennent à Sylvie que sa fille se prostitue dans l'hôtel où Georges est mort. Ils découvrent les sommes accumulées et le site sur lequel elle donne des rendez-vous. La famille est atterrée par cette situation. Sylvie exige que sa fille consulte un psy. Sa copine Véro a peur de laisser son mari raccompagner seul Isabelle après une séance de baby-sitting. Las de ces petites bassesses et soupçonnant sa mère d'entretenir une relation amoureuse avec Peter, il n'y pas jusqu'à son beau-père qu'Isabelle provoque. Lors d'une soirée, elle se laisse draguer par le gentil Alex qui l'aime sincèrement.
C'est le printemps et Alex et Isabelle font l'amour pendant que Victor se masturbe. Mais Isabelle est déçue de voir Alex trop bien accueilli dans sa respectable famille et rompt avec lui. Elle remet la puce qui lui sert à obtenir des rendez-vous tarifés dans son téléphone et se rend dans l'hôte de luxe qu'elle fréquentait à l'automne. Mais c'est pour rencontrer Alice, la femme de Georges, qui dit avoir accepté les infidélités de son mari qui favorisent (!) son caractère mélancolique. Les deux femmes montent dans la chambre et se remercient mutuellement en se faisant des confidences. Isabelle se réveille soudain. Alice est partie ; elle est comme délivrée de la salissure de la prostitution.
Portrait d'une jeune fille de 17 ans en quatre saisons et quatre chansons, Jeune & jolie est aussi une succession de quatre films : un préambule estivale où Isabelle n'obtient pas de l'amour physique ce qu'elle en espérait. Il y a ensuite le petit théâtre de la prostitution de luxe avec ses lustres et ses vulgarités. Puis, avec l'hiver, vient le temps d'y renoncer parce qu'un coup de théâtre est intervenu, la mort de Georges. La résolution vers un retour à la vie normale n'intervient pas dans cet épisode trois où Isabelle peut mépriser allégrement les petites bassesses de la petite bourgeoise. Survient alors l'épisode quatre, le printemps, où la grande bourgeoise mélancolique bénit et absout la jolie fille qui se réveille de la prostitution comme d'un sommeil de la conscience.
Ozon termine chaque épisode par une chanson de Françoise Hardy pour solliciter l'émotion. Il le commence par une idée de mise en scène pour éveiller l'intérêt. Ainsi, au premier plan du film, le frère qui observe sa soeur se déshabillant à la jumelle. Ainsi au début du second épisode, le premier rendez vous avec Georges où Isabelle a déjà bien maitrisé le rituel de la prostitution de luxe ; ainsi de l'intervention de la police au début du troisième épisode; ainsi de l'activité sexuelle du printemps au début du quatrième.
Le remplissage est un peu plus laborieux en dépit du flash-back sur les débuts de la prostitution qui dynamise un peu le récit. Ozon analyse assez finement la détresse adolescente qui n'a pas toujours le naturel et le sympathique manque de sérieux du temps de Rimbaud (le poème On n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans lu a plusieurs voix par les élèves de la classe) ni des intentions aussi machiavéliques que celles décrites par Choderlos de Laclos dont Isabelle lit Les liaisons dangereuses.
Il est en revanche un peu navrant de voir Ozon s'acharner sur les petits travers de la bourgeoise : psy dépassé sur l'analyse du désir et le montant de ses honoraires, couple recomposé flirtant avec l'adultère, petite famille contente d'elle-même alors qu'il se montre plus complaisant avec Georges et Alice. Ozon attribue à ces grands bourgeois une grandeur d'âme qui se voudrait singulière et comme un contre-poison à la morne petite-bourgeoisie mais qui m'a paru bien rance.
Jean-Luc Lacuve le 30/08/2013