Bruegel, le moulin et la croix
2011

(The mill and the cross). Avec : Rutger Hauer (Pieter Bruegel), Michael York (Nicolaes Jonghelinck), Charlotte Rampling (Mary), Oskar Huliczka (le musicien qui joue de la corne) et Joanna Litwin (Marijken Bruegel). 1h31.

Année 1564, alors que les Flandres subissent l'occupation brutale des Espagnols, Pieter Bruegel l'Ancien, achève son chef d'œuvre Le Portement de croix, où derrière la Passion du Christ, on peut lire la chronique tourmentée d'un pays en plein chaos. Son but est, dit-il, de représenter des pèlerins venus porter le deuil de la Flandres. Bruegel et sa femme ont six enfants, une fille et cinq garçons dont le dernier dort encore avec sa mère. Ils se chamaillent mais sont gentils.

Bruegel a pour ami le collectionneur Nicholas Jonghelinck qui possède chez lui Chasseurs dans la neige et La tour de Babel et auquel est destiné ce Portement de croix. Bruegel lui en explique le sujet. Le Christ est conduit au calvaire mais le peuple, qui ne voit jamais les événements importants de l'histoire, semble n'y prêter que peu d'importance. Il le place ainsi au centre de son tableau mais presque caché au milieu de la foule. A gauche, il dessine l'arbre de vie ainsi qu'une citée resplendissante et, à droite, l'arbre de mort et la foule, groupée en forme de cercle noir, assistant à une exécution. C'est sa femme, lorsqu'elle aura trente ans de plus, qu'il imagine comme modèle de la vierge Marie au premier plan.

Bruegel observe un marché au pied de la colline surmontée du moulin. Un jeune couple y vient pour vendre un veau. L'homme est soudain attaqué par les tuniques rouges, les soldats espagnols, qui le fouettent et le battent à mort avant de l'exposer, ligoté à une roue, au sommet d'un mat où ses yeux seront mangés par les corbeaux.

Nicholas Jonghelinck se révolte devant une telle sauvagerie. Il voit son peuple réduit à l'esclavage, les hommes jugés hérétiques condamnés à mort et les femmes enterrées vivantes.

Marie aussi s'inquiète. Son fils était admiré comme prophète. Maintenant il a été arrête par les soldats. Ceux-ci lui mettent une couronne d'épines et s'en vont le crucifier entre deux autres condamnés à mort.

Nicholas Jonghelinck est révolté et demande à Bruegel de rendre compte de ce contexte politique dans son tableau. Bruegel fait un signe au meunier qui le regarde de son moulin, en haut de l'éperon rocheux. Celui-ci arrête le temps et laisse au peintre le temps de figer cette scène pour l'éternité.

Judas reçoit ses trente deniers et les jette de dépit dans une église. Bruegel, qui passait par là, le voit se pendre.

Le Portement de croix est aujourd'hui exposé dans la salle 10 du kunsthistorisches museum de Vienne.

Le film a le mérite de mettre en scène le contexte politique dans lequel le tableau été peint. Il le fait de manière beaucoup trop caricaturale, la domination espagnole ne deviendra véritablement sauvage que quelques années plus tard.

Plus contestable la vision surplombante du peintre et la recherche permanantes du pittoresque de la part du réalisateur. Il fait fi de toute vraisemblance géographique en collant son imagerie numérique sur des paysages réels comme si Bruegel les avaient vu comme tel, lui colle une nombreuse marmaille alors que le peintre n'a laissé en mourant que deux fils en bas âge. La reconstitution de la passion, sulpicienne et grotesque, n'apporte strictement rien au film.

Jean-Luc Lacuve le 05/02/2012.

 

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Thème : Le cinéma dans la peinture