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La forêt de quinconces

2016

Voir : photogrammes du film

Avec : Grégoire Leprince-Ringuet (Paul), Pauline Caupenne (Camille), Amandine Truffy (Ondine), Marilyne Canto (Eve), Antoine Chappey (Bruno), Thierry Hancisse (Le clochard), Héloïse Godet (L'amie d'Ondine), Arthur Teboul (Le poète slameur). 1h49.

Ondine et Paul s'aiment. Au sens propre comme au sens figuré, Paul force Ondine à courir après son amour qui en demande toujours plus. Dans le parc, Ondine tombe. A bout, excédée, elle rompt. Paul ne s'en remet pas et c'est ivre-mort que son beau-frère, Bruno, le retrouve au matin dans la rue et le conduit chez lui où Paul retrouve sa sœur, Ève. Elle le réconforte, espère qu'il se remettra, et lui offre la montre de leur père.

Paul s'enfuit et rencontre un clochard qui lui affirme être l'incarnation du hasard et pouvoir lui fournir une réponse à son souhait d'oublier Ondine ou de se venger des femmes. Paul, sans but, prend le métro, et est attiré par une jeune femme de rouge vêtue. Station Stalingrad, il la suit jusque dans les loges d'un théâtre. Elle y répète une chorégraphie à laquelle Paul se joint. Leurs corps s'affrontent et se séduisent. La jeune femme, Camille, est séduite par le discours de Paul qui la convainc de venir dormir et rêver dans son appartement. Au matin, Camille s'en va sans bruit, comme elle l'avait promis. Elle  découvre cependant sur le pas de la porte une valise en osier. Ce sont les affaires personnelles de Paul qu'Ondine est venue porter. Camille y découvre les lettres d'amour de Paul. Prise de jalousie, elle en subtilise une et met la valise d'osier à la poubelle. Elle remonte dans la chambre de Paul, toujours endormi, et lui jette un sort. Elle dépose un bijou dans sa paume : tant qu'il le gardera, il sera fou loin d'elle et, seule, elle sera capable de l'apaiser.

Réveillé, Paul est pris de vertige, voit du sang courir dans les ruisseaux et ne trouve de l'apaisement qu'auprès de Camille. Celle-ci lui avoue être à l'origine du sortilège qui l'enchaine. Il faudra qu'il fasse couler le sang de la joue de la jeune femme pour en être délivré. Paul n'hésite guère : refusant cet enchaînement, il balafre Camille. Camile se venge en déposant le bijou dans le sac d'Ondine à la piscine. La jeune fille, devenue plus forte, agresse Paul et lui casse sa montre protectrice. C'est ensuite le clochard qui lui révèle qu'il devra choisir entre, soit la raison et la paix, soit l'amour et la guerre.

Désemparé, Paul décide de partir. Un sac à dos sur une petite route du Sud, il demande son chemin à un poète-slameur. Le soir, il arrive près d'un lac illuminé par la lune. Celle-ci dans le ciel est parfaite ; son reflet dans l'eau est plus flou et changeant, à l'image du monde des humains. C'est dans cette eau qu'il faut courageusement se baigner. Ce que fait Paul.

  Un premier film accompagné d'un profond désir de cinéma, d'essayer crânement différentes possibilités, non pas gratuitement mais pour tenter des impressions nouvelles en reconnaissant des emprunts envers des maîtres du cinéma.

Dimension fantastique de réalisme poétique en créant une histoire d'amour par des marqueurs du destin ou du hasard comme le clochard, souvenir directe du clochard interprété par Jean Vilar dans Les portes de la nuit (Marcel Carné, 1946) ou des femmes magiciennes comme Carole (Laura Smet) transformée en diable à la fin de La frontière de l'aube (Philippe Garrel, 2008). Même force du gros plan déterritorialisé quand se prononcent les paroles excessives que dans Rois et reine (Arnaud Desplechin, 2004) le fond bleu de la lettre lue par le père est ici remplacé par un fond écaillé qui prend la place  du mur réel, bien peint, de l'appartement de Paul, lorsque Camille ensorcelle celui-ci à son réveil. Le lyrisme porté par les moments chantés chez Christophe Honoré, se trouve ici décuplé par les formules incantatoires et les déclarations en octosyllabes.

Même le recours à différents formats de projection n'a rien d'artificiel. Le cadre au format 1/2:40, lyrique, est celui du début dans le parc, de la fin sous la lune et de la scène de séduction la nuit. Le cadre resserré 1.33 est propice aux moments magiques, l'incantation maléfique et l'apparition des objets symboles : la montre protectrice offerte par Eve, le bijou maléfique de Camille, le miroir. Le format 1.66, celui des années 60-70 en France, est employé le plus couramment. Le retour récurent à la forêt de quinconces comme autant de chemins possibles que l'on peut choisir : vengeance, oubli, Camille, Ondine, départ... laisse souffler un vent de liberté sur les personnages, jamais prisonniers des beaux dispositifs formels qui magnifient chacune des séquences.

Jean-Luc Lacuve le 30/06/2016

 

 

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