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La bataille du rail

1946

Thème : Résistance

Avec : Jean Clarieux (Lampin), Jacques Desagneaux (Athos), Tony Laurent (Camargue), Robert Le Ray (le chef de gare). 1h25.

Dans une gare de province, deux hommes, le chef de gare, Athos et son adjoint Camargue, organisent la résistance : passage de fugitifs, de courrier, tracts, envoi de renseignements à Londres. Des sabotages ont lieu. Des otages sont pris et fusillés. Après le débarquement, l'organisation Résistance Fer est prête. Les Allemands veulent envoyer des renforts vers la Normandie où la bataille fait rage vers Caen et Avranches, et rassemblent un convoi de 12 trains, baptisé Apfelkern. Mais la petite ligne secondaire où il s'engage saute et le convoi doit revenir sur la grande ligne. En pleine nuit, Camargue fait dérailler une locomotive et huit wagons. La grue géante est sabotée à son tour et le train de nouveau bloqué. Quand ils repartent, ils sont précédés d'un train blindé que le maquis attaque en vain, mais la résistance réussit à faire sauter la voie entre le convoi de tête et le suivant, le 1504, qui déraille et choit dans un ravin. Dérivés sur les lignes électrifiées, les trains restants sont à nouveau bloqués par une coupure du courant. Les locomotives à vapeur font tomber leurs feux. L'aviation alliée, prévenue, intervient alors. En Normandie, c'est la déroute et les haut-parleurs des gares annoncent la libération; les premiers américains arrivent sur le triage, tandis que s'ébranle le 122, premier train libre.

Le projet du film, qui devait alors être un court-métrage intitulé Résistance de fer en référence au nom d'un groupe de résistants cheminots, remonte à octobre 1944. Le groupement professionnel qu'est le Comité de libération du cinéma français compte parmi ses membres une majorité d'adhérents au PCF. A travers le film, le comité souhaite mettre en valeur l'action clandestine des hommes du rail. Parallèlement la SNCF qui porte également cette idée appele à l'aide le service cinématographique aux armées. Le projet du film rassemble ainsi le groupe Résistance-Fer, la SNCF et la commission militaire nationale.

En 1944, encore peu connu du public, René Clément, n'a pas joué de rôle actif dans la résistance et n'est ni membre ni sympathisant du parti communiste. Il a en revanche déjà réalisé pas moins d'une quinzaine de courts métrages, notamment Ceux du rail (1943) pour mettre en valeur le travail des cheminots. La prouesse technique dont il a fait preuve, embarquant de lourdes caméras sur des petits bouts de plateforme à bord des trains, rassure les producteurs. Il se déplace donc dans divers endroits de France à partir de novembre 44, accompagné de sa dialoguiste, Colette Audry, pour lire les tracts et recueillir les témoignages.

À partir de ces données, Clément écrit plusieurs versions de son projet. Il choisit la région de Chalon-sur-Saône comme lieu d'action. Le tournage commence en mars 1945 et dure cinq semaines, alors que la guerre n'était pas encore terminée. Un film provisoire est présenté aux différents représentants des institutions concernées en mai. Avec leur approbation, on propose alors d'augmenter le budget du film et d'en faire un long métrage. C'est en août 1945 que le film adopte son nom officiel, La bataille du rail, qui élargit le thème de la résistance à l'ensemble des acteurs qui y ont participé.

Le film veut monter la France résistante, le sens du courage, de la solidarité et du sacrifice des Français lors de cette période. Il montre d'abord que les cheminots - la classe ouvrière - furent admirables, puis que leurs supérieurs, et donc la SNCF tout entière, ne l'étaient pas moins. Il fantasme une France où tout le monde aurait été résistant en oubliant les convois qui emmenèrent les Juifs vers les camps de la mort. On y voit aucune allusion à la collaboration : chaque personnage entre de son plein grés dans l'action de manière enthousiaste. Reflet de l'état d'esprit que le france veut montrer après-guerre, le film reçoit le Prix du jury international du premier festival de Cannes en 1946. C'est également un gros succès populaire.

La Bataille du rail, film de propagande comme le furent les films soviétiques, avec son montage "cut", ses refus du récit traditionnel et des personnages emblématiques a pourtant longtemps été pris pour un documentaire. Certaines images ont été utilisées dans des livres d'histoire, des séquences confondues avec des fragments d'actualité (Le film mêle employés de la SNCF et acteurs professionnels - on se demande d'ailleurs qui tient les rôles d'Allemands...). C'est bien pourtant dans ses scènes d'action que le film est remarquable. Il reconstitue quelques faits d'armes de la Résistance ferroviaire : les sabotages quotidiens ou le déraillement spectaculaire - sans trucage numérique ! - d'un convoi de troupes allemandes.

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