Construction cinématographique faite à partir de dix ans du journal vidéo d'Alain Cavalier, tourné entre 1994 et 2005.
Le film entremêle cinq séries : celle d'Alain Cavalier lui-même se montrant d'abord filmant une nuit puis après une première opération du cancer de la peau ; une troisième fois, se préparant à entrer à l'hôpital après une récidive de ce cancer et enfin en gros plan son visage défiguré par les récentes opérations mais s'amusant à jouer Docteur Jeckyll et myster Hyde.
La seconde série, probablement la plus importante, parle de la mort de son père et du vieillissement de sa mère. Nettement plus légères, les troisième et quatrième séries mettent en scène la relation de Cavalier avec sa compagne Françoise Widhoff et avec ses amis. Une cinquième série laisse entrevoir l'actualité (Le 11 septembre notamment).
Nombreux les petits animaux : pie, lapin, écureuil, corbeaux viennent apporter un contrepoint morbide ou guilleret.
Dans les années 60, le cinéaste tourne des films avec de grands acteurs et connaît un certain succès. Lassé par les pressions de l'argent et du marché, Alain Cavalier décide d'épurer son cinéma et adopte par conséquent la caméra DV.
Un journal intime, même construit autour de grandes séries (ses parents, sa maladie, sa compagne, ses amis, l'actualité) est-il une proposition de cinéma ? La réponse est ici clairement oui, grâce au talent de Cavalier fait de plans magnifiques (la poire et le citron) ou de plans semblant toujours être pris en mouvement de quelque chose de déjà commencé et dont on voit le segment le plus fort.
Nettement moins ample que le Cher journal de Moretti, moins violemment personnel que Tarnation de Jonathan Caouette, Le Filmeur présente une expérience de cinéma aussi intéressante que celles proposés par le cinéma expérimental autobiographique américain de Andy Warhol à Jonas Mekas.