Professeur de philosophie auteur d'un ouvrage maintenant ancien, La philosophie mystique chez Simone Weil, François Hainault enseigne dans un lycée de Saint Etienne. Il a pour élève Mathilde qui est revenue de toute croyance : famille, sentiments, culture, travail. Fasciné par son désenchantement et sa lucidité, il entreprend de lui faire réussir le bac. Il succombe à la passion amoureuse, y renonce. Mais Mathilde s'attaque moralement et physiquement à la femme de François (qui dirige une librairie et écrit des articles pour la presse) qui lâche prise et celui-ci lui revient. Ils sont découverts faisant l'amour dans une salle de classe. François est muté dans le Nord. Mathilde se laisse mourir de consomption dans une chambre donnant sur sa salle de classe. Devant la mer, François s'en va méditer sur l'amour et la vanité de l'existence.
Un sommet du film naturaliste où sont opposés, la surface : le réalisme social (la conseillère pédagogique, la réunion des professeurs, les réactions des élèves) et la profondeur : les pulsions du monde originaire (la maison sous l'orage, le paradis terrestre). La séduction des images (la culture, la réalité sociale, l'apparence) est sans cesse relativisée par la croyance profonde dans la vanité des activités humaines :
-" Vous m'intriguez" , - "ça veut
dire que j'existe."
"En 68, le prolétariat a déçu mes parents. Vous
savez ce qu'ils ont trouvé à la place ? La philosophie hindoue,
l'illusion, la maya. Du coup, lui, il s'est plus occupé de rien, elle,
c'est le détachement, une dingue et une salope."
"La culture et les diplômes vous aideraient à vous agitez
mieux et plus agréablement."
" La vie est plus riche que toutes les représentations qu'on peut
en avoir."
" Le spectacle des illusions des autres me fait perdre les miennes."
Les images n'ont, peut-être, d'autre valeur que de révéler la présence de Dieu. C'est sans doute le sens de l'extrait du livre de François lu par Mathilde :
"Dieu attend comme un mendiant qui se tient debout, immobile et silencieux, devant quelqu'un qui peut va lui donner un morceau de pain. Le temps est l'attente de dieu qui mendie notre amour, les mendiants qui ont de la pudeur sont ses images."
Cette omniprésence du conflit entre surface et profondeur cachée s'incarnait aussi dans l'opposition conscient-inconscient. "Devoir" de Mathilde :
Pour les classiques et Bergson, l'inconscient ça n'existe pas c'est l'ensemble des souvenirs auxquels on ne pense pas dans le moment mais qu'un effort de mémoire suffit à rappeler. Le seul intéressant, c'est Racine. Phèdre et Titus sous l'effet de la passion sont dominés par des forces qui les manipulent, ils sont comme possédés. Pour Racine c'est Dieu qui agit. Seulement les forces que Dieu utilise sont les mêmes que celles de l'inconscient freudien. Et puis, à la fin du siècle dernier il y a Freud, l'inconscient était déjà dans l'air, mais lui le met en forme à partir de son expérience médicale : c'est l'ensemble des souvenirs ou représentations refoulés totalement ignorés du sujet qui parfois réapparaissent sous la forme du symptôme. Ca veut dire que tous les gens sont agits par des forces, des sentiments, des désirs qu'ils ignorent totalement comme dans les névroses ils sont prisonniers de leurs destinées. Ils rencontrent toujours les mêmes drames, les mêmes amours malheureuses. On a l'impression qu'ils sont le jouet de la fatalité et bien pour la psychanalyse, ils sont prisonniers de leur inconscient . prisonniers de désirs refoulés, interdits donc inconscients. Mais, peu à peu, Freud arrive à vaincre les résistances des malades. Le souvenir traumatisant devient conscient, le malade en parle et le symptôme disparaît.
Film de commande pour la Sept qui existait encore à peine, Noce blanche a été écrit avant le tournage de De bruit et de fureur. :
"Personne n'avait avant voulu le produire parce qu'on trouvait que les dialogues étaient trop compliqués. Il a fallu le succès de De bruit et de fureur pour que je puisse le faire : là j'ai eu de l'argent sans problème. Quand j'ai rencontré Vanessa Paradis, trois semaine avant le tournage, je l'ai vue comme une inconnue, et elle collait exactement au personnage." Brisseau, avril 1992, Cahier du cinéma n°454
Deuxième succès commercial français de 1989 après Trop belle pour toi, Noce blanche dans lequel Brisseau à une part des bénéfice lui permet de financer en partie Céline produit par la Gaumont après que Brisseau ait quitté Les films du losange.
Bibliographie : les Cahiers du cinéma n°425, novembre 1989