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Quatre nuits d'un rêveur

1971

D’après Nuits blanches de Dostoïevski. Avec : Isabelle Weingarten (Marthe), Guillaume des Forêts (Jacques), Maurice Monnoyer (l’amant). 1h27.

Une nuit, Jacques qui se promène sur le Pont-Neuf, croise une jeune fille au comportement étrange. Il s'arrête, la regarde ; elle a enjambé le parapet et est sur le point de se jeter à l'eau. Jacques l'en empêche. Ils font connaissance. Elle s'appelle Marthe. Ils se donnent rendez-vous le lendemain soir.

Lors de la seconde nuit, ils se racontent leur histoire; l'homme qu'aimait Marthe est parti aux Etats-Unis, ils devaient se revoir au terme de son séjour, un an plus tard. Sans nouvelles de lui, elle a voulu se suicider. Jacques est peintre; il vit en solitaire dans un monde clos où prédomine le rêve.

La nuit qui suit, le sentiment d'amour à l'égard de Marthe est devenu pour Jacques une certitude. Marthe oublie son désespoir et exprime son plaisir d'avoir rencontré un ami comme Jacques.

Le lendemain soir, une nouvelle histoire d'amour semble avoir commencé pour Jacques et Marthe. Mais ils croisent l'ancien ami de Marthe, de retour. Marthe part avec lui et dit au revoir à Jacques qui les regarde s'éloigner. Dans son atelier, Jacques travaille à ses toiles, plongé dans sa rêverie.

"Ce film n’est pas du style policier. L’auteur s’efforce d’exprimer, par des images et des sons, le cauchemar d’un jeune homme poussé par sa faiblesse dans un aventure de vol à la tire pour laquelle il n’était pas fait. Seulement cette aventure, par des chemins étranges, réunira deux âmes qui, sans elle, ne se seraient peut-être jamais connues."

Pickopquet s'ouvre sur une page de cahier sur laquelle on peut lire "Je sais que d'habitude les gens qui ont fait ces choses se taisent ou que ceux qui en parlent ne les ont pas faites et pourtant je les ait faites. Puis, plus bas et en voix off "Oh, Jeanne, pour aller jusqu'à toi, quel drôle de chemin il m'a fallu prendre". Commence alors la séquence de courses à Longchamp avec, en voix off : "Depuis plusieurs jours ma résolution était prise. Mais en aurai-je l'audace ?"

C’est par ces textes que commence le film qui adapte et transpose très librement le roman de Dostoïevski Crime et châtiment. Michel (= Raskolnikov), irrésistiblement attiré par l’interdit, séduit par l’acte presque gratuit, le geste virtuose, s’estimant au-dessus des lois, décide de devenir pickpocket professionnel, pour le plaisir (le vertige) de voler mais aussi pour l’excitation à l’idée de se faire pincer par la police qui le surveille de près. Il s’agit d’un film sur l’orgueil et la rédemption, la pesanteur et la grâce, car il existe une grâce chez ce voleur Michel, à la fois dans l’exercice de son "art" de l’escamotage et dans sa rencontre avec Jeanne qui, à la fin, vient le revoir dans sa prison. Le célèbre magicien Kassagi a servi de conseiller à Bresson et joue dans la fameuse séquence de la gare de Lyon où, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, un train entier de voyageurs est littéralement dépouillé de tout objet de valeur.

Le film est constitué de seize séquences séparées par des fondus au noir. Dans la première séquence à Longchamp, Michel ne parle pas de face : la voix est hors champ, dissociée du visage pendant une dizaine de minutes, ce qui accentue l’opacité fascinante du personnage. Michel est ce pickpocket qui ne veut pas trouver sa place dans la société et qui ne coïncide jamais totalement avec lui-même. Il ne noue pas d’échange en dehors du vol et vit dans une perpétuelle absence de lui-même jusqu'à sa prise de conscience que Jeanne lui est nécessaire.

 

Source : Synthèse de l’intervention de François NINEY du 13 octobre 2008 par Jean-Claude Vian

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