Le tableau a été réalisé par Titien pour la chapelle du Christ de l'église des Frari en échange de la concession d'y être enterré. Une fois les négociations échouées, l'œuvre fut ramenée à l'atelier puis trouva, vraisemblablement dans la première moitié du XVIIe siècle, un nouvel emplacement dans l'église Saint-Ange de Venise, puis elle entra dans la Gallerie dell'Accademia.
Le sens de l'œuvre, conçue pour une sépulture, est centré sur les thèmes de la mort, du sacrifice eucharistique et de la Résurrection, auxquels font allusion de nombreux éléments symboliques. Dans le bassin de l'abside en mosaïque, un pélican se déchire la poitrine avec son bec pour nourrir ses petits de son sang, symbole du sacrifice du Christ et de la Résurrection. Au-dessus des deux socles à tête de lion se dressent les statues de Moïse (à gauche) et de la Sibylle hellespontique (à droite), dont les noms sont inscrits sur les socles. À l'intérieur de la niche, stylistiquement inspirée de l'architecture de Giulio Romano et Sebastiano Serlio, la Vierge tient le corps sans vie de son fils tandis que Marie-Madeleine crie au monde sa douleur suite à cet événement tragique. Comme Michel-Ange, Titien se représente dans la Pietà destinée à son enterrement : il est le vieil homme prosterné devant la Vierge, traditionnellement identifié comme Nicodème ou Joseph d'Arimathie.
La technique picturale est typique de ses dernières œuvres et se caractérise par des couleurs sombres appliquées avec des coups de pinceau riches et rapides, vibrants de lumière. Courant 1576, lors de la peste qui fait rage, l'artiste transforme l'œuvre en un grand ex-voto contre l'épidémie, comme le montre le panneau à droite de la composition.
Cependant, la mort frappa Titien le 27 août de la même année et l'achèvement définitif des travaux fut réalisé par Jacopo Palma le Jeune, comme le dit l'écriture en bas au centre : « Quod Titianus inchoatum reliquit / Palma reventer absolvit deoq dicavit opus ». (ce que Titien a laissé inachevé, Palma a terminé avec révérence et a dédié l'œuvre à Dieu). L'intervention de Palma se limite cependant à l'ange à la torche, peint sur un putto antérieur laissé inachevé par Vecellio, à l'écriture et à quelques glacis tendant à camoufler les divers ajouts.