Peyrelebade Odilon Redon 1897
 
 

Peyrelebade
Odilon Redon, vers 1897
Huile sur toile 36,5 × 45 cm
Paris, Musée d'Orsay

   


Odilon Redon avait, enfant, la santé fragile. Aussi ses parents décidèrent-ils de l’éloigner de Bordeaux et de l’envoyer dans la propriété familiale de Peyrelebade, domaine viticole du Médoc, où il fut confié à la garde d’un oncle. Il y vécut jusqu’à onze ans une enfance qu’il décrit comme absorbée dans la rêverie : “Enfant, je recherchais les ombres ; je me souviens d’avoir pris des joies profondes et singulières à me cacher sous les grands rideaux, aux coins sombres de la maison dans la pièce de mes jeux. Et au dehors, dans la campagne, quelle fascination le ciel exerça sur moi ! […] Je ne vivais qu’en moi, avec une répulsion pour tout effort physique.” Ces années le marquèrent à jamais. Après s’être définitivement installé à Paris en 1872, il continua à se rendre tous les ans à Peyrelebade. Il y réalisait ses “Noirs”, fusains et lithographies, aux sujets si étranges. Il lui était toujours difficile d’en repartir. Aussi, lorsqu’en 1897, le domaine, dont les profits déclinaient depuis de nombreuses années, fut vendu, Redon fut-il profondément touché, au point de se brouiller avec le reste de sa famille. C’est probablement lors de son dernier séjour, d’avril à novembre 1897, que Redon réalisa cette petite toile représentant la bâtisse de Peyrelebade. Comme ses nombreuses études de paysage, elle resta dans son atelier jusqu’à sa mort. La clarté de la palette rappelle que les impressionnistes ont révolutionné depuis une vingtaine d’années l’appréhension du paysage en France. Le traitement palpitant des arbres et les aplats de couleurs du mur et du ciel, traduisant la franchise de la lumière du sud, évoquent l’œuvre de Camille Corot, que Redon admirait et qu’il avait rencontré en 1864.

Texte : Cécile Thézelais

 

 

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