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Un taureau la nuit nous regarde fixement puis s'en va s'exposer à la lumière de la lune.
Le torero, Andrés Roca Rey, rentre d'un combat dans un minibus. Après neuf heures de route, il a hate de rejoindre la chambre d'hôtel et enlève ses vêtements tachés de sang, celui des taureaux qu'il vient de combattre.
Nouveau départ du minibus dans l'après-midi pour une nouvelle arène proche, celle de Madrid. Andrés n'est pas en terrain conquis, le public siffle souvent. Le taureau épuisé n'a plus guère envie de combattre. Andrés le provoque et se fait déséquilibrer par le taureau. Il tombe à terre, le taureau l'attaque mais il s'en sort miraculeusement. Il revient au combat sous les acclamations mais le taureau tarde à tomber et le public ne réclame pas même une oreille. Dans le bus qui les ramène à l'hôtel, les membres de l'équipe, les poseurs de banderilles et le picador félicitent Andrés: il a des couilles et est le plus grand.
Nouvelle corrida cette fois par temps de pluie. Lors de la troisième corrida, Andrés tombe une première fois, échappant encore aux cornes du taureau, puis il est plaqué sur la barrière entre les deux cornes du taureau furieux, échappant une nouvelle fois par miracle à la mort. Faisant preuve d'une bravoure exceptionnelle, il revient dans l'arène porter le coup de grâce au taureau. Cette fois il aura droit à la queue et aux deux oreilles
Andrés s'habille dans sa chambre d'hôtel avec l'aide du maître des épés" et rejoint l'arène péruvienne. Le sol est jaune, les taureaux marrons mais leur sang toujours rouge. Après les mises à mort, la troupe quitte l'arène.
Il sera difficile après ce documentaire de dire que le torero ne fait pas preuve de bravoure et que le taureau n'est pas cruellement traité. Le plus beau plan reste néanmoins celui qui ouvre le film; un taureau la nuit nous regardant fixement puis s'en allant s'exposer à la lumière de la lune. C'est dire si cette pratique anachronique de la tauromachie est vouée à la mort lente; Andrés Roca Rey, star incontournable de la corrida contemporaine, pourra difficilement trouver un successeur.
Le mérite du film est de suivre au plus près l'art du toréro,sa solitude face à la mort qu'il conjure avec signe de croix et collier catholique censé être protecteur. Le cadrage serré sur les voyages en minibus, l'habillage en chambre d'hôtel avec le maître des épés puis les quatre combats dans l'arène donne au film une radicalité bienvenue qui l'extrait de l'anecdote et de la polémique. Le plan du départ de la troupe sonne comme un adieu à une pratique anachronique, observée une dernière fois.
Jean-Luc Lacuve, le 9 avril 2025.