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L'avocat de la terreur

2007

Genre : Documentaire

Avec : Jacques Vergès, Patricia Tourancheau, Lionel Duroy. 2h15.

Des photos de Jacques Vergès avec Pol Pot et Khieu Samphan, n°1 et 4 du régime des khmers rouges. Dans son bureau, l'avocat minimise les responsabilités du régime. Oui il y a eu des morts mais ce n'était pas une volonté affichée du régime. Il condamne la torture et la répression mais cela n'a, dit-il, pas porté sur des milliers de personnes. Quant au nombre des morts, on n'est loin des chiffres annoncés lorsque l'on ouvre les charniers. On oublie trop souvent les bombardements américains et la famine provoqué par l'embargo américain. "On a fait un package et on a tout mis sur le dos des khmers rouges" dit-il.

Jacques Vergès s'engage dans la résistance comme dans une aventure risquée exaltante. Etre sous les ordres d'un général condamné à mort le comble de bonheur. La France c'est Montaigne, c'est Diderot, c'est la révolution ce n'est pas les colons car le 8 mai 1945, les colons massacraient entre 10 000 et 45 000 algériens qui manifestaient leur allégresse pour avoir participer à la guerre. A Sétif on donna l'ordre de tirer si sortait le drapeau algérien.

Après avoir fait des études de lettres et de langues orientales, Vergès s'inscrit au barreau de Paris à trente ans. Il défend Djamilah Bouhired dans une atmosphère de lynchage : "Est-ce une audience de justice ou un meeting d'assassinat ?" demande-t-il aux juges. Il sait qu'ils sont incapables de comprendre la cause algérienne ainsi n'essait-il pas de les convaincre en faisant guili-guili comme les avocats de gauche le conseillaient mais il provoque afin que les incidents mobilisent Londres, New York ou Bruxelles.

Djamilah avait le visage de la révolution. L'Algérie vivra libre s'apprêtait-elle à déclarer devant la guillotine. Si l'opinion internationale ne s'était pas mobilisée pour la sauver, Vergès aurait demandé un rendez-vous à Lacoste et Massu et les auraient abattus : "fort heureusement dieu tout puissant n'a pas voulu".

Pour Lionel Duroy journaliste, Vergès est né colonisé, né en guerre, né en colère. Il ne veut ni passer des accords ni faire des compromissions mais être contre. Il est avocat par accident. C'est le seul endroit où il peut avoir une tribune mieux que celle de journaliste. Tous les yeux sont braqués sur un combat qui se joue à deux entre un juge et un terroriste et personne ne peux empêcher l'avocat de parler.

Sa vocation, Vergès l'attribue à son identification à la victime, son premier client, un petit malfrat en lequel il s'est reconnu. Il justifie les attentats car en Algérie, les terroristes sont suivis par la population contrairement à la France actuelle.

Le Premier ministre Michel Debré donne l'ordre d'assassiner les avocats qui font le procès de la torture : Ben Abdalla,Vergès, Oussedick, Ould Aoudiad. Le premier est tué, le second en réchappe. Il voyage pour Révolutions Africaines notamment en Chine. Il est contre la coexistence pacifique prônée par les Russes et d'accord avec les Chinois pour continuer la lute dans les pays coloniaux. Ce n'est pas dans la ligne Ben Bella. On l'envoie en Israël défendre un palestinien juste après son mariage sous l'impulsion de Boute Fika. Sa déclaration fait l'objet d'une photocopie dans un journal israélien ce qui accroit sa popularité.

Il est avocat sur un détournement d'avion à Athènes en 1968 puis à Zurich en février 69. Il met en place sa stratégie de rupture où il refuse de participer aux règles calssiques d'un procès pour diminuer la peine du condamné mais cherche à exhalter la noblesse de la cause.

Vergès disparaît après le 24 février 1970 après 7 ans de mariage et deux enfants avec Djamilah. Il ne réapparait q'en 1978. 77 % des personnes interwievées par Schroeder le pensent au Cambodge, sollicité par quelque chose qui lui paraît important. Nuon Chea, n°2 du régime, aujourd'hui agé de plus de quatre-vint ans réfute cette hypothèse. Il aurait pu être Mansou nom de clandestin travaillant pour Arafat et mouvements terroristes. Haddad et Habache internationalistes chrétiens marxistes cherchent à profiter des manifestations mondiales de jeunes pour embaucher des terroristes non palestiniens en Iran, Irlande, Allemagne et Japon. "C'est pour des raisons sérieuses que je ne veux pas parler d'eux tout cela est très simple". répond Vergès qui ne nie pas ces relations avec François Genoud, nazi suisse, qui tente à cette époque d'unifier le mouvement palestinien.

Vergès raconte cette anecdote de clandestin. Chez un traiteur, il se sait reconnu par la veuve d'un journaliste qui pourrait faire courir le bruit de sa présence à Paris. Il s'approche d'elle et lui déclare tout de go : "Alors la grosse, ça boom ?" Le seul détail vrai qu'elle racontera c'est cette phrase improbable de Vergès et personne ne la croira. On dira "Depuis que son ami Pierre est mort, elle débloque."

Patricia Tourancheau sait qu'en 1977-78, il possédait un abonnement sur des lignes vers l'extrême orient qu'il remboursera avec une valise de billets de petites coupures disant provenir de Moïse Tshombé, assassin présumé de Patrice Lumumba, en 1968. Vergès aurait ainsi durant ces années remboursé un emprunt de 100 briques (720 000 euros). De cette aventure déclare Vergès :" Je suis revenu mince, le tain hâlé et aguerri. J'avais plus de distance par rapport aux choses."

Avec l'effondrement des modèles politiques, il devient avocat tout azimut : Armée rouge, Carlos.. Il fonde l'association internationale des prisonniers politique avec Klaus Croissant, condamné pour sa défense et son aide aux brigades rouges.

En 1974, Jean-Paul Sartre déclarait : "Je soutiens la violence comme arme politique là où elle est nécessaire c'est à dire là où les affrontements de masse existent et peuvent être déchaînés". En attendant Magdellena Kopp, maîtresse de Carlos, fait chanter les ambassades avec un premier attentat sans mort et la menace d'une attaque sanglante dans le pays si refus de payer.

Magdallena est dénoncée par la police hongroise mais Carlos négocie avec le gouvernement. L'un des membres de la commission réunie par Gaston Deferre pour accepter la libération de Knopp rend publique la déclaration. Selon, Gilles Menage, directeur du cabinet de Mitterrand Deferre dit : " celui qui a averti porte la responsabilité du sang versé ". Le procès est organisé en juillet avec une difficulté majeure : Bruno Breguet a jeté son arme parce qu'elle s'est enrayée mais s'il avait la volonté de tuer c'est la cours d'assise pour une peine supérieure à sept ans. Si c'était seulement pour faire peur alors il ne méritait que la correctionnelle. le juge d'instruction Jean-Louis Debré puis le tribunal se laissent convaincre de cette falsification judiciaire. Le procès s'ouvre toutefois après l'ultimatum et ce sont les attentas de la Rue Marbeuf et du train du capitole. La plaidoirie de Vergès peut se résumer ainsi. "Ils seront libérés par une armée qui défend une juste cause. Votre responsabilité est celle du délai et donc du sang versé".

Barbie est livré en février 83. Vergès fait dérailler une énorme machine, le procès exemplaire de la guerre de 39-45. Encore une fois il élargit le débat et évoque les crimes contre l'humanité commis en Algérie, en Afrique noire durant l'esclavage et fait le Procès de la torture en France Vergès trouve euphorisant ce procès qui le met afce à trente-neuf avocats de la partie-civile, je suis tout seul chacun d'eux ne vaut qu'un quarantième de ma personne. Quarante zigues à feindre la même émotion que vous n'éprouvez pas
Plus jamais ça on en entendu ça cent fois mais en face qu'est ce que ce salaud va encore inventer aujourd'hui ? Et on attendait avec impatience l'invention du salaud
Une part de ses officiers c'est comporté comme des soldats nazis qu'un homme seul soit insulté par une foule de lyncheurs je défendrais même Bush mais à quelle condition. Qu'il plaide coupable ?

C'est ensuite l'affaire Naccache. La diplomatie a livré la guerre à l'Iran (soutien l'Irak, refuse le remboursement du prêt et arrête Nacache qui tentait de tuer Chapour Baktiar. Mitterrand gracie les cinq condamnés à perpétuité après dix ans.

Carlos kidnappé au Soudan. Il avait tué trois hommes de la DST.Vergès lui fait retirer sa plainte pour enlèvement est-ce une trahison ?


Vergès conclut que Contrairement au médecin on peut refuser un client. Mais, une fois que l'on a accepté, la confiance nous oblige à défendre notre client bec et ongles et à utiliser toutes les armes que les lois et les usages nous donnent. Il faut toutefois ne pas franchir la ligne blanche sans quoi nous devenons vulnérables.

Schroeder ne cherche pas à pousser Jacques Vergès dans ses retranchements et le laisse parler. Son travail consiste à mettre en contrepoint aux déclarations toujours intelligentes et souvent émouvantes et drôles de l'avocat des interviews d'intervenants extrêmement bien documentés sur ses activités

La première force du documentaire réside dans la qualité de ces témoignages. Patricia Tourancheau et Lionel Duroy, journalistes à Libération livrent des informations précises et argumentées provenant de plusieurs années de recherche. Barbet Schroeder dispose aussi de moyens lui permettant d'enquêter au Cambodge comme dans les arcanes du pouvoir français de l'époque, de Gilles Ménage, directeur de cabinet de Mitterrand aux services secrets.

Comme tout grand documentaire celui-ci dépasse largement son sujet, le procès d'une personnalité médiatique du barreau ou le portrait d'une époque complexe pour mettre en avant la complexité réjouissante d'un monde où les valeurs morales se sont moins effondrées- chacune des personnes interviewées fait preuve de beaucoup de conviction- que rabougries à force de simplification et de rétrécissements des points de vue.

Qu'importe finalement le mystère Vergès. Ses années de disparition semblent plutôt liés à un problème de remboursement d'une dette qui le conduira à faire du renseignement qu'à une compromission avec les Khmers rouges ou à un noble travail de révolutionnaire. L'important est sa capacité à toujours rebondir et à relancer le combat de la dignité humaine, celui hérité de ses maîtres Montaigne et Diderot, un débat que d'aucun cherche à recouvrir d'une noble bienséance et à étouffer sous l'opprobre.

C'est ce fil rouge qui suit Schroeder avec ténacité indiquant dans le générique qu'il a dû délaisser d'autres cas défendus par Vergès : Omar Raddad, Cheyenne Brando, Roger Garaudy, historien négationniste, Louise-Yvonne Caseta, trésorière de l'Ump, Paul Baril, le serpent serial-killer, Tarek Aziz, vice Premier ministre de l'Irak, Max Frerot action directe Abassi Madani , Ali Benhadj du FIS en Algérie, Omar Bongo despote Gabon Blaise Campaore dictateur du Burkina Faso, Idriss Deby, dictateur du Tchad, Denis Sassou N'guesso, dictateur du Congo Brazzaville, Gnassingbe Eaydema, dictateur du Togo, Slobodan Milosevic, dictateur de Serbie.

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