Une locomotive quitte le dépôt et vient à quai. Elle va partir. Lentement, les bielles se mettent en marche. Puis leur mouvement s'accélère. Roues, bielles, pistons vont à grande vitesse, comme la locomotive qui avale littéralement rails, aiguillages, ponts métalliques. Le mécanicien, parfois, regarde le paysage, les poteaux et fils télégraphiques, défiler à toute allure, puis le ruban des rails, avalé par la machine. Roues, bielles, pistons ralentissent. La locomotive s'arrête. Le voyage est terminé.
"Il ne s'agit pas ici d'illustrer une œuvre musicale qui se suffit à elle-même. Nous avons seulement tenté de lui donner un équivalent plastique. En accordant, grâce au cinéma, les mouvements, les lignes et les formes (des plus concrètes aux plus abstraites, prises dans la nature même), nous avons essayé d'atteindre à quelque chorégraphie du monde et des choses".
Jean Mitry avait songé, dès 1932, à mettre en images le poème symphonique, "Pacific 231", d'Arthur Honegge. Bien que le découpage visuel de son uvre ait intéressé, Mitry ne trouve pas de producteur pour mener à bien son projet. Il le reprend en 1947 et trouve alors un financement après avoir reçu un accueil favorable de la S.N.C.F. Le tournage a lieu en août 1948 et se déroule dans des conditions difficiles : la disposition d'une locomotive et de voies libres n'était pas un mince problème au lendemain d'une guerre qui avait détruit une grande partie du matériel et du réseau ferré français. Trois caméras, protégées par des caissons, fonctionnaient simultanément, enregistrant parfois les mêmes images, mais à des vitesses différentes. Mitry qui s'était entouré des conseils d'un musicien professionnel, Marc Ducouret, effectua le montage.