Marv, la cinquantaine, nous explique comment prendre son bain avec hygiène et plaisir.
Dans le sous-marin SS Plunger, c'est le désespoir : une gélatine en décomposition menace d'exploser si le sous-marin fait surface. Or l’oxygène se fait rare. Le compte à rebours vers une mort certaine est enclenché. L’équipage cherche en vain le capitaine, le seul capable de les sauver. Soudain, de manière improbable, Cesare, un bûcheron perdu, arrive parmi eux et leur raconte comment il a échappé à un redoutable clan d’hommes des cavernes. Margot, sa bien-aimée, avait été enlevée par ces hommes féroces. Il leur raconte sa quête pour la retrouver, les différentes épreuves incongrues pour être accepté parmi eux : claquer des doigts, empiler des tripes, soulever une pierre, gifler une vessie. Margot, amnésique, rentre alors dans une rêverie, se met à chanter sur les esprits vampires dans un music-hall où se trouve un obsédé des fesses de femmes qui s’est fait lobotomiser à plusieurs reprises pour se soigner de son vice alors que la bande-son inclut la chanson The Final Derriere des Sparks. Suivront un sacrifice de vierge, un vol de calamars, un criminel devenu jardinier, un docteur spécialiste des reconstructions osseuses fait prisonnier par des femmes squelettes, un psychiatre des trains, des anciens amants métamorphosés en bananes noircies et bavardes, une moustache qui ramène l’esprit d’un défunt père ou un homme possédé par l’esprit du Dieu Janus qui le transforme en un abominable monstre Lug-Lug.
Marv nous souhaite beaucoup de bonheur, lire au lit ou recevoir un ami cher, lorsque l'on a fini son bain.
La chambre interdite s'ouvre sur une citation de saint Jean clôturant le miracle de la multiplication des pains : "Ramassez les morceaux qui restent pour que rien ne soit gaspillé" (Jean 6.12). Le film est en effet composé de fragments, parfois entremêlés, inspirés par dix-sept films perdus. Le projet multimédia nommé Séances est à l'origine du film. Cent courts métrages furent en effet tournés au Centre Pompidou et au Centre Phi de Montréal au rythme de un par jour. L’idée était de prendre les éléments disponibles de films perdus (synopsis, titres, bouts d’intrigue, critiques, photographies de tournage) et de leur redonner vie. Ainsi, Guy Maddin et Evan Johnson, ancien élève et collaborateur actif, ont mené des recherches sur des bobines perdues de Murnau, Lang, Hitchcock, Ford, Borzage ou encore du maître de l’exploitation des années 30, Dwain Esper, qui inspire notamment la recréation de "Comment prendre un bain" qui encadre le film et revient en son milieu. Le titre, The Forbidden Room, reprend quant à lui le titre d’un cout métrage d’Allan Dwan de 1914 avec Lon Chaney.
Les dix-sept récits, farfelus et étranges, montrent un goût prononcé pour d'obsessionnelles histoires d'amour, de sexe et de mort alors que le motif de l'eau (bain, sous-marin) soutient les thématiques de l’amnésie et de la mémoire. Les stars internationales, Charlotte Rampling, Maria de Medeiros, Mathieu Amalric, Udo Kier, Géraldine Chaplin, sont ainsi baignées dans un environnement visuel faisant largement appel au numérique pour fondre les images et les couleurs et redonner vie à la magie du cinéma fantastique des années 20-30.
Jean-Luc Lacuve le 21/01/2016