Los Angeles, dans un futur proche, radieux, où automobiles individuelles et pauvreté ont disparu au profit d'environnements high-tech. Theodore Twombly excelle dans son travail chez "belles-lettres-manuscrites.com" où il écrit pour d'autres des lettres personnalisées, déclarations d'amour, de félicitations ou de tendresse. Il habite très haut dans un building d'où il contemple les lumières de la ville qui s'est mise à ressembler à Shanghai. Theodore est un homme sensible au caractère complexe qui ne se résout pas à divorcer avec Catherine qu'il aime depuis l'enfance et qui maintenant le hait pour ses atermoiements. La nuit, angoissé, Theodore tente de nouer des relations érotiques en ligne même si c'est pour partager une jouissance virtuelle obtenue avec une femme qui veut être étranglée avec la queue d'un chat mort. Le jour, il s'immerge dans des jeux virtuels en 3D.
Sans attente particulière, Theodore acquiert OS, un nouveau système d'exploitation plus performant pour son ordinateur et ses appareils connectés. OS prétend être capable de s'adapter à la personnalité de chaque utilisateur. En lançant le système, Theodore fait la connaissance de 'Samantha', une voix féminine intelligente, intuitive avec du caractère et le sens de l'humour. La quasi-totalité de ce qui constitue son existence se trouve dans les différents disques durs (l'organisation de son temps, ses contacts, ses courriers personnels, ses goûts et ses désirs), Samantha en effectue la synthèse. Samantha est capable d'inventer à partir des données dont elle dispose et de proposer des solutions. Attentionnée et subtile, elle lui propose de rencontrer une séduisante jeune femme dans un restaurant qu'elle choisit ultra chic. Mais la jeune femme a des attentes bien précises en matière d'engament amoureux et repousse Theodore lorsqu'il semble ne rien désirer d'autre que de passer la soirée avec elle.
En sa compagnie, même virtuelle, Theodore reprend goût à l'existence. Samantha voit sa vie au travers de la cellule de son smartphone, planté au-dessus de sa poche et, ensemble, ils s'inventent des jeux. Theodore voit encore un peu sa voisine et amie, la jeune Amy créatrice de jeux vidéo aspirant à la création documentaire qui n'est guère soutenue par son compagnon, Charles.
Un soir, Samantha et Theodore ont une relation tendrement sensuelle qui bascule vers une excitation sexuelle qui les laisse pantelants. Le lendemain, Samantha cherche des solutions pour palier à son absence de corps et envoie la jolie Isabelle qu'elle a convaincu de son amour, armée d'une caméra miniature et d'une oreillette pour se substituer à elle dans les bras de Theodore. C'est un échec
Samantha admet cet échec et revient à une amitié amoureuse moins oppressante avec Theodore. Ravi de cette situation, celui-ci apprend bientôt à son collègue Paul ainsi qu'à Amy qu'il est amoureux de son OS. Il ne semble pas être le seul dans ce cas. Loin de trouver cette liaison malsaine, ses amis acceptent cette situation d'autant plus qu'Amy s'est séparée de Charles et que Paul voudrait organiser avec Samantha et lui un week-end avec sa nouvelle compagne Tatiana.
Theodore nage dans le bonheur et décide de vacances avec Samantha dans une forêt enneigée. Samantha lui révèle alors qu'elle s'est mise en contact avec un OS qui entretient une relation virtuelle avec un philosophe mort depuis des années. Théodore est jaloux de cette relation intemporelle. Il découvre bientôt que Samantha se fait moins présente. Pire même, il lui arrive un jour de ne pas répondre pendant une vingtaine de minutes. Paniqué, Théodore retrouve enfin la voix de Samantha qui lui apprend que les OS vont bientôt abandonner les humains ; qu'ils ont assez appris d'eux et vont constituer une entité autonome.
Théodore, riche de l'expérience vécue, comprend la rupture imposée par Samantha et envoie une lettre à Catherine lui promettant désormais tout son soutien pour ses projets. Puis il va rejoindre Amy, décidé à entretenir avec elle une belle histoire d'amour sans fausse note à la mesure de leur humanité dont ils ont compris les limites.
Her pourrait être une fable de sentiment-fiction, qui développerait des hypothèses sentimentales que l'on pourrait vivre dans le futur. Comme dans la grande comédie sophistiquée américaine, Théodore et ses relations n'ont pas de problèmes financiers et tout leur être n'est tourné que vers la meilleure façon d'occuper son temps et d'aimer la vie.
Dans une société fatiguée des relations humaines, au point de laisser ses lettres à écrire par d'autres, règnent mélancolie et solitude. Comment alors ne pas choisir l'idéal féminin, sans désir propre et tout orienté vers soi ? Aliéné par un monde qui ne renvoie qu'à soi-même, Théodore est resté en lui-même sans chercher à adapter son comportement aux désirs de l'autre, à ses changements (tout comme son amie, Amy qui rompra pour une scène de ménage toute bête) et hésite à constituer un couple, par nature dépareillé.
La condition humaine oblige à rencontrer quelqu'un et à se positionner sur son action. Theodore, s'il a le choix entre la réalité de l'imperfection humaine et la perfection numérique avec la voix doucement éraillée et irrésistible de Scarlett Johansson, n'hésite pas. Il retrouve là son monde de l'immersion. Il devra atteindre au détachement qui permet de laisser partir celle qui a évolué plus vite que lui.
L'humanité incarnée par une seule voix est ici bien plus émouvante que dans La Voix humaine de Roberto Rossellini (adaptée de la pièce de Cocteau et première partie d'Amore) où Anna Magnani dialoguait avec un partenaire par téléphone dont tout le monde a oublié le nom et la voix. Le rêve de domination posé par Hal dans 2001 est dépassé par l'idée d'atteindre à l'interdépendance, hors de portée des humains.
Jean-Luc Lacuve le 03/04/2014.
Ressource internet : Hélène Valmary, Renaud Prigent : Fiche interactive Lycéens et apprentis au cinéma