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Minnie and Moskowitz

1971

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(Minnie and Moskowitz). Avec : Gena Rowlands (Minnie Moore), Seymour Cassel (Seymour Moskowitz), Elsie Ames (Florence), John Cassavetes (Jim), Katherine Cassavetes (Sheba Moskowitz), Lady Rowlands (Georgia Moore), Val Avery (Zelmo Swift), Timothy Carey (Morgan Morgan), Holly Near (L'irlandaise). 1h54.

Seymour Moskowitz, beatnik d'une trentaine d'année est gardien de parking à New York. Il fréquente les cinémas, les cafétérias minables, les bars branchés ou non où il drague maladroitement. S'il réussit à échapper à la colère d'un yuppie qu'il a provoqué, il se fait tabasser dans un bar irlandais. Profitant de la générosité de sa mère, il met le cap sur le soleil, la Côte Ouest et Hollywood où il est de nouveau gardien de parking.

Minnie Moore s'ennuie et passe la soirée avec son amie Florence avec qui elle travaille au Musée d'Art moderne. Elle rentre saoul chez elle et y retrouve Jim, son amant, qui la tabasse parce que, dit-il, il est jaloux et il l'aime. Il n'en retrouve pas moins sa femme et ses trois enfants.

Le lendemain, Minnie est contrainte d'accepter un rendez-vous concocté par Florence avec Zelmo, un veuf acariâtre, violent et complexé qui l'invite à déjeuner. Minnie doit quitter le restaurant quand Zelmo déballe ses problèmes intimes de sa voix sonore. Sur le parking du restaurant, c'est Moskowitz qui vient au secours de Minnie quand Zelmo l'injurie. S'en suit une bagarre qui laisse Zelmo le visage en sang alors que Moskowitz s'enfuit avec Minnie dans sa camionnette. Il lui paye à manger dans un snack mais sa tentative de séduction est repoussée par Minnie. Il la poursuit en camionnette, et l'oblige à y monter pour la reconduire à son travail

Là, au milieu des collections du Musée, Jim vient avec son fils lui annoncer qu'il la plaque. Le soir, Minnie retrouve Moskowitz devant sa porte qui vient exiger des excuses. Il s'aperçoit qu'elle est au bout du rouleau et l'invite à manger dans un snack où la serveuse fait des difficultés pour servir un vermouth-cassis à Minnie. Moskowitz conduit donc Minnie dans un snack plus minable encore au bord de la route. Minnie, interloquée, doit de nouveau subir la hargne de Moskowitz. Il la reconduit chez elle.

Plus tard le soir, Moskowitz ramène une fille chez lui sans se rendre compte que c'est une prostituée. Elle se laisse séduire et il la raccompagne au matin

Moskowitz se rend alors chez Minnie qu'il réveille et lui déclare qu'il l'aime. Ils passent la nuit ensemble.

Le lendemain dans la soirée, Minnie appelle d'une cafétéria et invite Moskowitz à manger une glace, ils vont au cinéma et Moskowitz quitte la ville pour la conduire sur les hauteurs de Los Angeles. Il n'arrive pas à la convaincre d'aller danser. Sur le parking de la boite de nuit, il obtient toutefois un baiser. Mais arrivent deux couples d'amis Minnie, bourgeoisement habillés. Elle n'ose pas leur présenter Moskowitz. Quand l'un des hommes revient pour la chercher, elle lui présente Moskowitz mais c'est trop tard et celui-ci s'enfuit. Minnie demande à l'homme de la raccompagner. Moskowitz les attend et déclenche une bagarre. Il fait la paix avec Minnie, se coupe la moustache sous une impulsion subite comme preuve de son amour. Ils se baignent dans la piscine glacée. Moskowitz demande Minnie en mariage. Ils appellent leurs mères.

Lors de leur première rencontre au restaurant la mère de Moskowitz jette un froid en se déclarant surprise que Minnie soit "bien faite et mignonne". Elle conclut son appréciation d'un "j'aime ça !" puis dit pis que prendre de son fils. Elle déconseille à Minnie de l'épouser et insiste auprès de sa mère sur l'inadaptation sociale de son fils. Heureusement, la mère de Minnie calme le jeu en décrivant la gentillesse de Minnie à cinq ans.

Le mariage est célébré. Minnie et Moskowitz sont entourés d'enfants.

Minnie and Moskowitz suit la trame d'une comédie sentimentale classique, celle d'une rencontre improbable de deux êtres que tout oppose et qui se finit par un mariage.

Cette croyance dans le bonheur se révèle bien plus convaincante que celle proposée par Le lauréat réalisé quatre ans auparavant. Le film de Mike Nichols décrit la fin des croyances dans l'American way of life mais se montre assez conventionnel dans son dégoût de la sexualité au profit des fades amours des adolescents. Cassavetes ne sera pourtant jamais un héros de la contre-culture probablement parce qu'il ne cherche pas à opposer le monde bourgeois de Minnie et celui des marginaux fréquentés par Moskowitz. Si Cassavetes ne cache pas la violence qui peut sourdre à tout moment dans la société américaine, il capte aussi le bonheur du mélange des genres avec une mise en scène faite de grands blocs de séquences où les êtres se révèlent par les attitudes de leur corps autant que par leurs discours.

La violence des mâles

Si le film démarre sur le ton de la comédie avec les dragues extravagantes de Moskowitz, il manque de virer au tragique lors du passage à tabac de Minnie par Jim. La violence verbale de Zelmo, d'abord amusante, devient vite incontrôlable. Moscowitz lui-même se tape la tête contre les murs mais il ne s'en prend jamais qu'à lui et notamment à sa moustache. Il se fera d'ailleurs tabasser par l'ami bourgeois de Minnie en n'ayant réussit à ne décocher qu'un droit... sur Minnie qui s'écroule alors dans un grand geste burlesque.

 

Le bonheur est possible

Malgré cette violence, Minnie and Moskowitz est bien une comédie, la seule réalisée par Cassavetes. Le film s'ouvre et se clôt sur deux marqueurs symboliques d'un bonheur possible. Ce sont d'abord les cartons du générique à l'écriture incurvée désuète qui semble vouloir retrouver le ton des comédies des grands studios. Puis se sera, à la fin, la présence d'enfants venus dont on ne sait où au mariage de Minnie et Moskowitz. Ces enfants heureux donnent la morale en forme de conte de fée du film, celle du il vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants.

Cassavetes ne croit pas que le cinéma soit condamné à mentir aux gens en leur promettant le bonheur. Certes Minnie déclare à son amie Florence :

" Tu sais, je crois que les films sont une conspiration. Je te jure. Les films sont une conspiration parce qu'ils te conditionnent. Dès que tu es toute petite ils te préparent à croire à tout. Ils te préparent à croire aux idéaux, à la force et aux mecs bien, et bien sûr à l'amour. Et toi, eh bien, tu y crois. Tu grandis, tu sors, tu commences à regarder autour de toi, et rien ne se passe. Tu continues, tu prends un boulot. Tu commences à prendre du temps pour arranger les choses, tu soignes le décor de ton appartement… Tu essaies d'être féminine…Mais Charles Boyer n'arrive pas. Moi je n'ai jamais rencontré Clark Gable, encore moins Humphrey Bogart. Je n'ai jamais rencontré aucun d'entre eux, tu comprends, parce qu'ils n'existent pas. Mais les films te préparent à croire à tout ça et tu y crois.

On remarquera d'abord que les deux films que vont voir séparément Moskowitz puis Minnie se terminent mal. Dans Le faucon maltais, Sam Spade fait condamner celle qui l'aime et qu'il aime sans doute au nom de l'éthique et, dans Casablanca, Rick se sacrifie. Minnie semble se complaire dans ce fatalisme et se cache derrière ses lunettes noires dès que la vie ne se montre pas sous le jour romantique qu'elle souhaite. Moskowitz trouve en Bogart un modèle auquel il s'efforce de ressembler. A défaut de se comporter avec la classe de son héros cela lui permet de comprendre Minnie : "Manger une glace c'est comme se donner rendez-vous sous un coucou : être capable de tout faire pour toi ". Il mangera néanmoins sa glace d'une grosse bouchée qui fera grimacer de dégoût Minnie.

Dans Le port de l'angoisse, que Minnie et Moskowitz voient ensemble, Marie (Bacall) et Harry (Bogart) partent ensemble. Le film est entendu off, Minnie et Moskowitz ont remplacé leurs héros : Moscowitz à déclaré à Minnie qu'elle ressemblait à Laureen Bacall de profil. Ce à quoi, elle répond aimer ses jambes poilues. Le corps au milieu de la romance.

L'étrange beauté de leur relation, Cassavetes l'avait déjà exaltée avec la musique du Beau Danude bleu alors qu'ils parcourent les rues la nuit en camionnette. On notera aussi la déclaration d'amour au matin alors que Moskowitz vient de reconduire la prostituée. L'acceptation de l'étrange et de l'inattendu c'est aussi le baiser accodé sur le parking alors que tout va mal, les lunette que Minnie retire au snak quand Moskowitz lui dit : "Vous n'êtes qu'une jolie fille, c'est déprimant les gens qui se prennent au sérieux". C'est Moskowitz marchant sur les mains où déclarant que Minnie lui fait oublier de pisser ou encore quand il se coupe la moustache par inadvertance, presque emporté par son élan amoureux. C'est toujours le corps qui donne des preuves d'amour.

Jean-Luc Lacuve le 20/09/2007

Test du DVD

Editeur : MK2, septembre 2007. Durée du film : 1h51. Format 1.85. Version originale stéréo sous-titres Français et version française,

Minnie and Moskowitz

Suppléments :

  • Préface, par Luc Lagier 5’
  • Amours vagabondes, un film de Luc Lagier 20’
  • Bande-annonce
  • DVD 2 : Cinéma de notre temps un film de André S. Labarthes
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