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L'isolé

1929

Genre : Mélodrame

(Lucky Star). Avec : Janet Gaynor (Mary Tucker), Charles Farrell (Timothy Osborn), Guinn 'Big Boy' Williams (Martin Wrenn), Paul Fix (Joe), Hedwiga Reicher (madame Tucker), Gloria Grey (Milly). 1h30.

La veuve Tucker, ses quatre enfants en bas âge et sa fille Mary vivent pauvrement dans la crasse. L'adolescente subvient aux besoins de sa famille en vendant malhonnêtement les maigres produits de la ferme au village et aux ouvriers des lignes électriques. Il y a là Wrenn, le patron, grossier et séducteur, et Timothy, toujours de corvée. Pour un mensonge de "la gamine" à propos d'un sou, Wrenn et Tim en viennent aux mains au sommet du poteau. Mais au même moment, la ligne télégraphique annonce la déclaration de guerre. Avant de partir, Tim donne une fessée à Mary, qui le mord en retour. Elle avait bien volé un sou…

Au front, Tim et Wrenn reçoivent des lettres de Mary, qui propose de leur tricoter des chaussettes ! Wrenn envoie Tim à sa place pour une dangereuse mission. Le camion où il se trouve est bombardé. Tim, paralysé des deux jambes, rentre chez lui après un an de combat et un an d'hôpital. Mary le retrouve dans son fauteuil roulant et promet de revenir chaque jour en visite. Tim apprend à Mary l'honnêteté et la propreté, et s'aperçoit qu'elle devient une femme. Wrenn, qui a été renvoyé du front pour mauvaise conduite, parade en uniforme au village, délaisse Flora qu'il a déflorée, et jette son dévolu sur Mary au cours d'un bal. La jeune fille, naïve mais lucide, se refuse à lui.

Tim, incapable de se servir de ses jambes, se sent impuissant face à Wrenn. Après une cour incessante à la veuve Tucker, Wrenn obtient la main de Mary, désormais interdite de séjour chez Tim. Ce dernier promet à la jeune fille de venir parler à sa mère avant que Wrenn ne l'enlève. Malgré une tempête de neige, Tim parvient, avec ses béquilles et son courage, à la ferme Tucker. Mais c'est pour voir s'éloigner Wrenn et Mary. Il rejoint le couple à la gare et se jette sur Wrenn. Joe, le fidèle ami de Tim, et quelques habitants, mettent Wrenn dans le train en lui intimant l'ordre de ne plus revenir au village. Tim et Mary peuvent enfin vivre leur amour.

Film irresistible de tendresse, teinté d'une bonne dose de sensualité où l'amour fou permet au paralytique de courir sous la neige chercher sa fiancée.

Lucky star est un film dont on n'avait aucune image jusqu'en 1990 où une pellicule 35 mm fut retrouvée par la cinémathèque hollandaise. Les intertitres originaux ont été retrouvés dans les archives de la Fox. Dernier film à la Fox avec Gaynor, et dernier film muet de Borzage. William Fox achète un millier de salles juste avant la crise de 29. Après six semaines de tournage, 70 % du scénario ont été filmé. William Fox fait cependant tout interrompre pour tout recommencer en parlant. Farrell et Gaynor prennent des cours de diction. On impose ensuite à Borzage un "Dialog director" qu'il ne tarde pas à renvoyer. Comme Murnau avec Les quatre diables ou City Girl, on impose à Borzage des parties parlés. Heureusement la version sonore est destinée au marché américain alors qu'est tournée en parallèle une version muette destinée à l'étranger car le doublage n'est pas au point. Et c'est cette version muette, retrouvée en Hollande, qui est la seule à avoir survécue.

Le film est tiré d'une petite nouvelle, Three épisodes in the life of Timothy Osborn de Tristan Tupper, journaliste misanthrope vivant seul dans les forêts de la Caroline du Nord. Dans les cinq-six pages de la nouvelle, le personnage est blessé lors des derniers jours de la guerre. Infirme, il rencontre une jeune fille riche de la ville et une plus pauvre de la campagne avec laquelle il reste.

Borzage filme un prologue en 1914, où le héros est réparateur de lignes électriques où la mère de la jeune fille, très pauvre, essaie de placer sa fille. Le héros est blessé en 1917 et pas à la fin de la guerre. Il n'y a plus de jeune fille riche. La fin est totalement inventée par Borzage.

Les scènes les plus remarquables sont d'une part la transformation de Gaynor de chenille en papillon avec la double révélation : elle est blonde, elle est femme etd'autre part, la fin totalement folle. La neige qui tombe c'est la lumière, l'eau, le ciel qui parle. Elle immobilise ceux qui marchent et fait marcher ceux qui sont immobilisés. Lucky star c'est, l'étoile qui porte chance à l'autre: elle devient femme, il retrouve ses jambes. Seul, en France, Marcel Carné, jeune critique, défend le film.

Test du DVD

Editeur : Carlotta-Films, novembre 2010. 3DVD, 4 films. Nouveaux masters restaurés aux formats d'origine de 1.20 à 1.30, cartons en version originale, sous-titres français. 50 €.

DVD1 : L'heure suprême. DVD2 : L'ange de la rue. DVD3 : Lucky Star, La femme au corbeau. Suppléments : Entretiens avec Hervé Dumont (0h20, 0h12, 0h12), une analyse de Michael Henry Wilson(0h15). Un entretien audio avec Frank Borzage de 1958 (0h21). Trois courts métrages de Frank Borzage pour Screen directors playhouse de 1955-56 : Day is done, A ticket for Thaddeus, The day I met Caruso.

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