Jerry est un jeune écrivain comique en devenir. Il vit à New-York avec sa petite amie Amanda. Les deux amoureux coulent des jours heureux, mais Amanda devient de plus en plus difficile : boulimique, névrosée, elle souffre également d'un blocage sexuel, agaçant particulièrement Jerry. Pour corser le tout, la mère d'Amanda, vieille ringarde aux rêves de strass et de paillettes, squatte leur petit nid douillet et attend de Jerry qu'il la conseille artistiquement. Bourré de doutes, ce dernier doit aussi composer avec un agent encombrant dont il est le seul client. Dans cet océan de turbulences, le jeune auteur trouve du réconfort chez Dobel, un collègue septuagénaire très intelligent, qui a un avis sur tout. Dobel devient le mentor de Jerry. Serait-il la solution à tous ses problèmes ?
La vie et tout le reste possède la même énergie à la fois désespérée et joyeuse qui faisait le charme de Annie Hall il y a maintenant près de trente ans. On retrouve de cette comédie sentimentale ce qui fait à la fois le bonheur du couple et sa lente dilution par le quotidien avant qu'une rupture aussi douloureuse que salvatrice ne redonne à chacun de ses personnages une nouvelle chance de départ.
Le flash back évoquant la première rencontre de Jerry et Amanda repose sur trois séquences extrêmement brillantes et émouvantes qui condensent toutes les scènes merveilleuses et loufoques où l'on sentait, palpable, l'amour entre Alvy Singer et Annie Hall. Le flash-back est amorcé dans la scène de l'échange de cadeaux pour l'anniversaire de leur rencontre où Jerry avoue off qu'il est tombé amoureux d'Amanda dès leur première rencontre et qu'il a tout de suite pensé au mariage en la voyant. Mais cette déclaration se fait sur lui marchant avec une jeune femme qui n'est manifestement pas Amanda et auquel il répète pourtant bien qu'il veut l'épouser. Le projectionniste aurait-il inversé une bobine ? Mais non ! Juste à ce moment là sort d'un restaurant Amanda avec son petit ami et son échange de regard avec Jerry nous fait immédiatement comprendre que leur coup de foudre les a eux comme nous pris par surprise. La séquence du restaurant suivie de la soirée dans une célèbre boite de Jazz, repose sur des dialogues finement ciselés où les fiancés respectifs d'Amanda et de Jerry regardent, impuissants, croître l'excitation amoureuse de leurs partenaires au grès de l'enthousiasme de leurs discours et de leurs références culturelles partagées. Enfin la rencontre dans le magasin de disques conduit sans artifice au premier baiser échangé que suivront sur le mode fréquentatif diverses rencontres à l'hôtel en attendant que Jerry se laisse larguer par sa copine.
Si le film est moins riche qu'Annie Hall sur la description du couple, il est par contre plus virtuose dans sa construction remplie de flash-backs très habilement introduits puis refermés. Cette structure à l'avantage de ne pas engluer le film dans une guimauve romanesque, le personnage de Jerry étant par ailleurs affreusement sentimental.
La vie et tout le reste possède l'énergie propre aux meilleurs films de Woody Allen, dont le discours omniprésent n'a pas pour but d'asséner une morale mais de s'exposer pour lui même, comme une façon de chercher la vérité par les moyens les plus burlesques.
Eloge de l'amour comme de la masturbation, des femmes comme de la misogynie, de la violence comme de la non-violence, de la psychanalyse comme de l'anti-psychanalyse de l'humour juif comme de l'humour anti-juif- l'ombre du 11 septembre plane néanmoins sur le film même si le pont de Manhattan est préservé- La vie et tout le reste est un immense et vibrant appel à jouir de la vie et à se sortir des situations masochistes dans laquelle elle ne manque pas de nous attirer. En ce sens, le film est assez proche de celui d'Arnaud Desplechin : Comment je me suis disputé (ma vie sexuelle) .
Jean-Luc Lacuve le 04/11/2003
"Hier soir, j'ai fantasmé sur une partie à trois avec moi, Marilyn Monroe et Sophia Loren. C'était très érotique. Et si je ne me trompe, c'était la première rencontre entre ces deux grandes actrices."