La toile est peinte par Paolo Véronèse pour le réfectoire du couvent dominicain de Saint Jean et saint Paul pour remplacer une toile d'un sujet similaire du Titien qui avait brûlé dans un incendie.
Dernière d'une série de « Dîners » à succès peints par le peintre à partir des années 1550, l'œuvre met en valeur les extraordinaires réalisations artistiques de Véronèse, capable ici de faire coexister savamment des éléments de théâtralité rhétorique avec des moments animés de convivialité animée dans un cadre monumental. La scène sumptueuse du banquet est encadrée par les grandes voûtes d'un portique. S'opposant aux effets bleu-vert pâle de l'architecture du fond, les personnages de chaque côté du Christ s'agitent dans une polyphonie chromatique et des poses et des gestes variés.
L'hédonisme du tableau - le sujet semble en fait être purement païen dans l'exaltation de l'amour de la vie au 16ème siècle Venise - semble si l'étranger au contexte religieux qu'il a réveillé les soupçons de l'Inquisition. L'œuvre est en effet célèbre pour avoir été au centre d'un célèbre épisode de "censure" artistique de la part du Saint-Office qui accusait le peintre d'hérésie pour avoir traité sans décorum le thème de la Cène, le transformant en banquet et enrichissant avec des présences insolites. Les inquisiteurs interrogent notamment le peintre sur son choix d'inclure des personnages tels que le serviteur qui saigne du nez, le bouffon nain au perroquet et même quelques hallebardiers « armés par les Allemands ».
Le 18 juillet 1573, Véronèse est convoqué par le saint Office car il est accusé d'hérésie par l'Inquisition. Si les questions des inquisiteurs montrent les premiers signes des rigueurs de la Compteur-réforme, les réponses de Veronese montrent clairement sa foi indefectible dans l'imagination créatrice et la liberté artistique. Pour sa défense, Véronèse a réitéré, avec une naïveté ostentatoire, le droit du peintre d'utiliser son imagination et de placer des figures "ornementales", en prenant la même licence qui est accordée aux poètes et aux "fous", en prenant toutefois soin de placer toutes les figures les plus imaginatives à l'extérieur.
Ne souhaitant pas se soummettre aux injonctions de l'Inquisition our éliminer les détails qui ont offensé la thèmatique religieuse de la Dernière Cène, il change simplement le titre en "Soupé chez lévy", un sujet qui tolére la présence des fous et des hommes d'armes habillés à la dernière mode tout enfaisant ressortir au premier plan la référence au cinquième chapitre de l'Évangile de Luc.