La maison de jeu | Pietro Longhi | 1740 | ||
Il Ridotto |
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Pietro Longhi est devenu, par le biais de sa peinture de genre, l'un des chroniqueurs les plus fidèles de son temps, évoquant une civilisation aujourd'hui disparue. Plus observateur que critique de son époque, il appelait moins au changement qu'il ne soulignait l'incompétence d'une classe en déclin, représentant avec ironie des dandys, des abbés et des vierges. Alors qu'il a peint plusieurs tableaux représentant la vie quotidienne à Venise, dont Le rhinocéros, La maison de jeu est représentatif de sa vaine satirique, laissant apparaître une douce impertinence et quelques traits grotesques. Dans cette maison de jeu, probablement celle, unique, autorisée à Venise, se tiennent au milieu de la pièce un homme et une femme vêtus de la bauta (qui signifie domino), costume de trois pièces, une cape noire (le tabarro), un tricorne noir et un masque blanc en carton bouilli (la larva). Ce masque de forme quadrangulaire offrait assez d'espace pour permettre de boire et de manger sans avoir à le retirer. La bauta apparaît à Venise à partir du XVIIIe siècle. Elle est portée indifféremment par les hommes et par les femmes. Très répandue pendant le carnaval, elle était aussi utilisée en dehors de cette période, lors de rencontres discrètes. Il est probable qu'il s'agisse ici d'une scène se passant durant le carnaval où étaient admis les étrangers dans la salle de jeu, ce qui pourrait être le cas de cet homme, à droite, porteur d'une bourse bien garnie. A gauche, le conciliabule entre l'homme et la femme derrière la table de jeu alors que des cartes sont tombées par terre, indique peut-être une tricherie à venir. De toutes façons, la soirée, pour les joueurs comme pour le couple, ne fait que commencer, comme l'indique le chandelier garni de bougies qui n'ont pas encore servi. Jean-Luc Lacuve le 28/03/10 |