Fondation Cartier
pour l'art contemporain, 261 boulevard Raspail, 75014 Paris
Tous les jours, sauf le lundi, tarifs: 7,50€ / 5€ jusqu'au 12 septembre |
Le titre de l'exposition, Gosse de peintre Beat Takeshi Kitano, est un clin d'oeil à son père, artisan avant la guerre et devenu, après la défaite, peintre en bâtiment : "A l'école, on se moquait de moi, c'était humiliant d'être traité de fils de peintre en bâtiment".
Avec cette exposition, Kitano veut donner une définition du mot "art" qui soit "moins conventionnelle, moins snob, plus décontractée et accessible à tout le monde". Il a accepté la proposition de la Fondation Cartier d'imaginer de toutes pièces une installation géante s'adressant aux enfants - quel que soit leur âge - truffée de gags, de marionnettes, de stands de jeux et, au sous-sol, d'écrans montrant son "vrai travail"- ses happenings télévisés où il fait le guignol déguisé en tank ou en Marie-Antoinette.
Le cirque Kitano
Ses réalisations sont à la fois ludiques et sombres. Ainsi ces plans "des armes secrètes de l'armée impériale japonaise" : une vingtaine d'animaux transformés en armes (baleine-hydravion, libellule-hélicoptère, éléphant à trompe en forme de canon...).
Un peu plus loin, une potence est montée, sur laquelle un mannequin-pendu montre comment échapper à la pendaison - toujours pratiquée au Japon - en mordant à pleines dents la corde nouée autour de son cou pour éviter qu'elle ne l'étrangle. Tout autour, des panneaux hilarants montrent divers ratés de la pendaison du premier criminel japonais à avoir survécu à la peine de mort.
Kitano évoque les "excès de la biotechnologie" avec des poissons dont le ventre est déjà tout garni de sushis ou d'autres qui ont des têtes de vache ou d'hippopotame.
Il aime pourtant les inventions hybdides : une petite voiture mécanique qui s'accroche à un sous-marin ou à un camion, une gigantesque machine à coudre-locomotive qui tourne à grand bruit pour confectionner un ruban dérisoire, se faisant ainsi la métaphore ironique de l’art contemporain.
L'exposition est largement interactive : on peut barbouiller un dinosaure de peinture, ou résoudre le casse-tête de la Tour de Hanoï, un jeu pratiqué, selon Kitano, par des moines bouddhistes pour leur méditation mais il faut, paraît-il, 580 milliards d'années pour venir à bout de la version exposée.
Amuseur et peintre
Ne voulant pas cultiver une image d'intellectuel en Europe, le réalisateur met en scène au sosu-sol de la fondation ses activités d'animateur roi de l'audimat au Japon. Il tourne actuellement huit émissions par semaine, dont une est dédiée à la politique, une autre aux mathématiques. Un panneau avertit le visiteur : "Voici le vrai travail de Takeshi Kitano".
Derrière des rideaux rouges, un grand mur d'images de Kitano côté Beat, dans tous les accoutrements possibles : danseuse, extraterrestre, poule, lapin, bouddha. Au milieu, trois écrans où on peut voir des extraits de ses émissions, séquences-catastrophes où des bus volent ou plongent, où on s'arrose sur le plateau. "Cet aspect de mes activités n'est pas vraiment connu en Europe, or je veux présenter toutes les facettes de ma personnalité", explique-t-il, jugeant qu'il est "bien plus stimulant et intéressant" de mélanger les disciplines entre elles que de les cloisonner
Non loin des téléviseurs sont accrochés vingt-quatre tableaux réalisés en 2008-2009, des tableaux naifs aux couleurs vives : des montgolfières peuplées de chats, un poisson qui a avalé un éléphant qui a avalé un tigre...