Thriller fantastique en deux parties réalisé pour la télévision, Le monde sur le fil est adapté du roman de Daniel F. Galouye, Simulacron 3. Il y est décrit un futur proche assailli par l’angoisse et la paranoïa.

Chacun des personnages apparait ici derrière un rideau de pluie, un écran de fumée, au milieu de la nuit ou à travers une vitre rendant sa présence au monde aussi incertaine que celle des circuits électroniques transformés en être humain. Les pulsions sexuelles et l'avidité capitaliste deviennent les fétiches d'un monde réel qui perd peu à peu son existence.

Cette fable métaphysique s'incarne dans une mise en scène baroque sompteuse multipliant les mouvements d'appareils, les angles de prises de vue, le symbolisme des couleurs. Précurseur de films clés, Scanners (1980) ou Existenz de Cronenberg ou Matrix, Rainer Werner Fassbinder construit un univers fait de faux-semblants et de voyages mentaux en maintenant un suspens constant à propos des actions de personnages tous bien définis et fascinants.

Juliane Lorenz accueille Michael Ballhaus, le chef-opérateur du film qui va assumer, 37 années après, la direction de la restauration du Monde sur le fil.

Après avoir intégré la direction de la Fondation Fassbinder en 1992, Juliane Lorenz recherche les copies des films que fassbinder n’avait pas lui-même produits. La WDR détenait des éléments originaux en 16mm réversible (Le Monde sur le fil a, entre autres films, été tourné en 16mm) mais ne pouvait envoyer que les bandes magnétiques (appelées MAZ en allemand, réalisées à partir de la pellicule originale et qui peuvent être envoyées sans risque). Les bandes magnétiques étaient toujours disponibles, par contre il n’existait plus de copie, donc plus de pellicule à projeter.

Lorsqu’en 1993, Juliane Lorenz visionne les originaux de la WDR, dont Huit heures ne font pas un jour, Martha, et Peur de la peur, elle constate que l’image a une teinte rouge tirant sur le jaune. En effet, sur les positifs réversibles originaux, les couleurs pâlissent et passent rapidement. Elle fait tirer des négatifs des films de la WDR, sur les versions non restaurées en gonflant une par une les pellicules 16mm en négatifs 35mm avec une importante subvention de la FKT (Filmkredittreuhand, qui n’est plus en activité aujourd’hui) et par la suite, un soutien du Goethe-Institut a financé une copie avec sous-titres en anglais en vue de la grande rétrospective Fassbinder projetée au Museum of Modern Art (MoMA) en 1997/98.

Il a toujours été difficile d’obtenir des financements pour les travaux de restauration ou le tirage de copies, et la situation ne s’est améliorée qu’avec la nomination de Julian Nida Rümelin au poste de ministre de la Culture et des Médias. C’est lui qui a pris l’initiative de créer en 2002 la Kulturstiftung des Bundes (Fondation fédérale pour la culture) qui est aujourd’hui responsable de la conservation du patrimoine culturel sous toutes ses formes. Ce n’est que grâce aux bonnes relations entretenues avec le MoMA que Juliane Lorenz a pu mettre en oeuvre un certain nombre de projets par le passé, dont notamment la restauration de Berlin Alexanderplatz. Dès les prémices, le MoMA s’est montré prêt à soutenir la Fondation Fassbinder, tout comme Susan Sontag. Dès 2004, le MoMA fait parvenir un accord écrit portant sur un montant de 100 000 dollars.