Editeur : Mk2, septembre 2008. Durée du film : 1h30 - Durée des DVD : 2h45. Format audio : VF 5.1 et 2 .0 Suppléments sur DVD2 :
1919. La guerre est terminée. Pas pour Antonin qui la revit inlassablement, comme une réalité physique, enfermé dans le labyrinthe de ses souvenirs, absent du monde réel. Qu'a t-il vu ? Qu'a t-il fait ? Pourquoi ne peut-il pas revenir dans le temps de la paix ? |
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Le film raconte d'une part la cure psychanalytique à la quelle se livre le professeur Labrousse pour faire sortir Antonin Verset de son mutisme et le raccrocher à son passé. Il raconte aussi, la dureté des combats de 1914-1948. Les deux histoires sont présentées alternativement, l'une prenant progressivement plus de place au fur et à mesure que la mémoire revient à Antonin mais le suspens reste placé sur la seconde pour savoir si Antonin pourra être guéri, si la clé du traumatisme sera révélée. Au sein de cette cure psychanalytique, le film de guerre reste original et fort. La peur avant l'assaut dans la tranchée, la revue des blessés que le professeur Lantier effectue en choisissant ceux qu'il peut soigner et ceux qui, faute de temps et de moyens, sont abandonnés à la souffrance et à la mort sont particulièrement poignantes. Plus classiques sans doute, les scènes de fraternisation : Antonin rencontrant Marie la française et son amant allemand déserteur, l'exécution du soldat tunisien brave et téméraire mais accusé de désertion pour s'être rendu à Paris pour réclamer la naturalisation promise. La cure psychanalytique utilise le cinéma au même titre que les croquis et les moulages pour comprendre les traumatismes. Gabriel Le Bomin s'est inspiré lui-même de ces images, montrées au générique et qui lui assurent cautions historique et scientifique. Le procédé est aussi intéressant dramatiquement, permettant de faire passer des informations lors de la projection aux jeunes médecins : "Trois mois après la fin des combats Antonin Verset était incapable de dire qui il était incapable de soutenir un regard. Seuls des prénoms, cinq au total constituait son langage, répétés inlassablement plusieurs dizaines de fois par jour. Aucun de ces prénoms ne correspond à sa vie du temps de paix. Ses souvenirs sont très précis. Il les vit comme une réalité physique. Son corps est traversé de gestes rameutant les images du passé". Ces explications scientifiques données dans un contexte qui l'est tout autant sont moins grandiloquentes que celles adressées à Labrousse au médecin des corps, Lantier, qui lui reproche de ne soigner que des simulateurs pour les pensions qui cherchent à obtenir un statut d'invalides de guerre Un bras coupé, une jambe en moins, une gueule cassée, ça vaut de l'argent En quatre années de combats combien de suicides combien de désertion ? Très peu, une incroyable résistance Sur les champs de bataille on s'arrange avec cette peur et son courage, c'est au retour que tout déborde. Combien d'hommes sans paroles, sans mémoire ? Leurs blessures ne saignent pas, elles ne se portent pas comme des médailles. La cure est ainsi vraisemblable, au moins autant que le film de John Huston, Que la lumière soit, sur les traumatisés psychiques de la seconde guerre mondiale. Après toutes ses aventures c'est l'exécution de ses pigeons, symbole de l'innocence, par des déserteurs transformés en brigands qui fait basculer Antonin dans la folie. le contact de la main de Madeleine le ramènera à la réalité
Grande importance du choix des objets symboliques : les médailles arrachées au cou des soldats, la fiole de gnole avant le combat, la croix portée par Antonin, son cahier dans lequel il consigne ses réflexions. Importance aussi des oiseaux les pigeons et l'image de la nuée d'oiseaux qui éclaircissent ou assombrissent l'avenir d'Antonin. J.-L. L. le 05/09/2008 Traumatismes de guerre : entretiens avec Louis
Crocq et Nicolas Offenstadt
Pour Nicolas Offenstadt, historien, les pathologies de l'époque sont très particulières. Le premier conflit mondial se caractérise par des bombardements intenses, continus. Un blessé psychique de 14-18 n'a pas la même attitude qu'un blessé psychique de la guerre d'Indochine ou d'Algérie. Beaucoup marchaient avec ce qu'on appelle des contractures psychiques, le corps refermé, replié, comme dans la position foetale de protection dans les tranchées. Beaucoup en sont revenus en se déplaçant comme des vieillards, à trente ans ! Pour, Louis Crocq, psychiatre des armées, brusquement à la guerre, le monde des symboles, les signes de culture et de civilisation, le monde choyé par le rêve et l'imaginaire disparaissent et ne reste plus qu'un monde brut, corporel, qui n'a plus de sens. Les médecins psychiques apparaissent en 1917 dans tous les pays. En Allemagne, ce sont les élèves de Freud. Ils ne veulent pas soigner le symptôme mais faire en sorte que le malade cesse d'avoir peur. La méthode consiste à faire revivre sous hypnose ou par conditionnement (comme le coup de sifflet) et faire parler le patient dessus. Faire revivre au patient mais aussi le faire parler pour provoquer des associations d'idées. Le thérapeute ne peut faire les associations pour son patient. Ce qui était inassimilable est pris dans une association, entre un avant et un après, qu'il est possible de relier dans son histoire de vie.
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présente
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Les
fragments d'Antonin de Gabriel Le Bomin
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