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L'aurore de F. W. Murnau

Editeur : Carlotta-Films. Octobre 2004. Nouveau master restauré. 30 €

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L'action se passe à n'importe quelle époque en n'importe quel pays. C'est l'été le temps des vacances et du tourisme dans un village situé au bord d'un lac. Un paysan délaisse sa femme et son bébé. Il est attiré par une touriste, une vamp venue de la ville. Elle veut l'emmener là-bas, faire en sorte qu'il se débarrasse de sa femme....

Pour Jacques Lourcelles, "L'œuvre la plus symphonique, la plus synthétique, la plus cosmique et en définitive la plus lumineuse de Murnau. Sur l'invitation de William Fox, qu'avait enthousiasmé Le dernier des hommes, Murnau part travailler en Amérique. Il bénéficiera là-bas d'une liberté totale et d'un budget plus vaste que tout ce qu'il avait connu jusque là."

Le film obtient trois Oscars. Celui de la meilleure actrice pour Janet Gaynor, celui de la photographie pour Charles Roscher déjà chef opérateur sur Faust avec ses les effets de lumière et Karl Struss au cadre et celui du meilleur film pour la Fox. Gliese obtient également une mention "honorable" pour le décor. Succès critique incontestable, le film ne fait cependant pas les entrées attendues et déçoit son producteur. William Fox n'hésitera ainsi pas à mutiler les oeuvres suivantes de Murnau pour les adapter au parlant où à ce qu'il croit être les goûts du public.. (voir : suite de la critique).

En 1927, Murnau a reçu trois Oscars pour L'aurore. Celui de la meilleure actrice pour Janet Gaynor, celui de la photographie pour Charles Roscher et Karl Struss et celui du meilleur film pour la Fox. Gliese a également obtenu une mention "honorable" pour le décor. C'est donc avec une grande confiance qu'il entreprend Les quatre diables en janvier 1928.

Dans une roulotte de Cecchi, le clown veille sur Marion et sa sœur qui ont perdu leurs parents. Bientôt deux jeunes garçons, orphelins de trapézistes viennent les rejoindre. L'entraînement est très dur et Cecchi, un soir qu'il rentre saoul, se montre violent avec les enfants. Le clown s'enfuit avec eux. Ils trouvent des cirques où ils gagnent leur vie tout en préparant leur grand numéro de trapèze. Un soir, trop vieux pour continuer son numéro, le clown s'effondre. Mais les enfants ont grandi. C'est eux qui prennent la relève dans leur numéro d'acrobates : les quatre diables.

Marion aime Charles depuis toujours et celui-ci, tout récemment encore, lui a fait cadeau d'une rose. Mais une femme fatale vient le voir au cirque et l'envoûte. Charles a bien conscience que son manque de rigueur peut détruire le groupe mais dit-il au clown : "Je ne suis pas un acrobate, je suis un homme avec des sentiments". Un soir Marion vient l'attendre à la sortie de chez sa maîtresse. Charles la trouve dans le froid, sous la neige, et lui promet de redevenir son ami et de ne plus voir cette femme qui détruit sa carrière. Il rompt, mis la femme fatale vient le relancer.

Le dernier soir de la représentation triomphale dans la ville, il est chez elle. Elle le fait boire et retarde la pendule d'une heure et demie pour qu'il rate la représentation. Mais Charles découvre l'heure sur une pendule de la ville et arrive juste à temps pour le spectacle. Marion a compris qu'il a trahi sa promesse et au lieu de lancer le trapèze seul, se lance avec l'agrès sachant que Charles la rattrapera mais qu'ils ne pourront tenir longtemps accrochés. Ils meurent tous les deux.

Pour sa première présentation à New York le 3 octobre 1928 au Gaieté, la Fox a utilisé une fin alternative. Marion se laisse tomber, ne meurt pas et avoue son amour à un Charles repentant. Murnau avait tourné aussi une troisième fin où Charles mourrait seul. Mais la plus logique et celle appréciée des spectateurs des preview était la double mort des héros.

La Fox sort une version parlante le 10 juin 1929 à Los Angeles. Sont crédités à la mise en scène A. van Buren et A. Erickson alors que J. Hunter Booth est crédité des dialogues. Mais tous les critiques ré attribuent le film à Murnau. Celui-ci ne vit jamais cette version, parti pour Tahiti le 12 mai. Après que la Fox ait modifié son titre Notre pain quotidien en City girl (L'intruse en français) il avait rompu son contrat avec la Fox.

Murnau tourne Nosferatu, film fantastique en décors réels. C'est la réalité qui est vampirisée par le fantastique. Le dernier des hommes est entièrement en studio pour expérimenter toutes les techniques cinématographiques. Pour l'Aurore, Murnau fait appel à son chef opérateur de Faust pour les effets de lumière. Tabou est tourné entièrement en plan fixe, sans mouvement d'appareil. Fin tragique de Murnau qui avait filmé le son en image et qui n'expérimenta jamais le cinéma parlant.

Le film raconte l'histoire d'un homme déchiré entre l'amour et le sexe. D'un côté l'objet aimé, l'éternelle jeune fille pure et parfaite ; de l'autre l'objet sexuel, irrésistible magicienne, envoûtante et possessive.

A ce déchirement entre la noblesse de l'amour et la violence des plus obscures pulsions s'ajoute l'opposition entre la pureté et la vertu de la campagne et la corruption pernicieuse de la ville tentaculaire.

Troisième opposition qui baigne les deux autres, le face à face occulte du jour et de la nuit. Au visage naturel, clair de la femme s'opposent les artifices de la lumière nocturne. C'est la dimension fantastique du film. La ville et la nuit envoient leur messagère voler ce qu'il y a de plus précieux dans le monde du jour. La ville et la nuit s'emparent de l'âme et de l'esprit de l'homme, lui proposent agitation désordre, perpétuelle excitation. Complice de la mort, la lune ne réfléchit que l'astre diurne. Le crime ou la mort ne peut avoir lieu de jour. Malgré les semelles de plomb pour évoquer le côté Frankenstein, le jour réveille la conscience et empêche le crime.

Le tram anti-naturel est aussi un messager de la nuit chargé d'entraîner le couple à la ville. La ville va intensifier l'amour du couple après le passage du lac, no man's land qui sépare les domaine du jour et de la nuit. Le parcours sinueux du train évoque un parcourt maléfique. Il faut effacer le traumatisme d'une terreur violente et de la culpabilité. Ainsi ce lent et pénible mouvement de crainte et de tendresse pour effacer les frayeurs, atténuer la honte, implorer le pardon épuiser la culpabilité. Les lumières divines, peintes à la main sur le fond du décor, renvoient au mythe de l'union sacrée de l'homme et de la femme avec un remariage par procuration.

Les plaisirs de la ville sont manifestes dès la sortie de l'église. Ce sont eux les nouveaux mariés. La ville n'est plus dangereuse. Les transparences ostentatoires indiquent une traversée des apparences. Par un fondu, ils se retrouvent dans une campagne fleurie, nimbée par la lumière solaire. Ce droit chemin est récompensé par un baiser de happy-end.

La ville présente ensuite sa réalité comique, son univers frivole. Le montage alterné avec les plans de la femme fatale indique de nouvelles épreuves. Le soleil artificiel et le travelling suspendu engloutissent le couple. Avec la danse de la moisson, le couple affirme sa noblesse face aux moqueries des bourgeois. Le couple se croit au paradis mais de noires créatures annoncent l'épreuve ultime du retour. La tempête est l'instrument de la puissance maléfique mais l'aurore se lève et dissipe angoisse et fantômes.

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